Attention: La série des Leprechaun ne contient aucun réel bon film. Cela dit, les films ne sont pas à rejeter pour autant. Certains s’apprécient tout simplement sur une autre échelle de valeur plus ironique. Aussi, cette chronique affichera deux notes. Une sera plus objective et l’autre mettra de l’avant l’intérêt risible du film comme argument.
Dix ans après avoir été enfermé dans une cave par un homme lui ayant volé son or, un farfadet cordonnier se libère et terrorise un groupe de jeunes. Son objectif: retrouver ses précieuses pièces.
Le premier Leprechaun n’est pas le film d’exploitation cynique que l’on pourrait supposer. Le revoir après avoir visionné le reste de la série le prouve hors de tout doute. En 1993, quand cette idée est venue au réalisateur Mark Jones (Rumplestiltskin), il y avait derrière le projet une réelle volonté de créer un bon film d’horreur pouvant s’adresser à toute la famille. Cette bonne intention s’est perdue à un certain moment durant le processus, mais elle explique plusieurs des décisions de réalisation prise durant le tournage. Elle explique également pourquoi un acteur respecté comme Warwick Davis (Harry Potter, Star Wars) a pu s’intéresser au projet à la base et comment Jennifer Aniston (Friends) a pu le choisir pour son premier rôle au cinéma: il y avait du cœur derrière le métrage. Malheureusement, cela ne suffit pas à créer un chef-d’œuvre. Dommage, car si le film avait pu aller au bout de sa volonté, on aurait pu avoir entre les mains un film d’introduction parfait pour les plus jeunes.
Ce qui fonctionne le mieux ici est issu des restes de cette prémisse. On notera, par exemple, les personnages d’Alex et Ozzie (Robert Gorman et Mark Holton), que l’on croirait sortis d’un autre film tant ils sont écrits sur un autre ton. Il y a chez eux une dynamique Goonies rencontre Of Mice and Men qui est beaucoup plus intéressante que celle que l’on trouve entre les personnages de Aniston et de Ken Olandt, pourtant davantage mise de l’avant. Ces deux amis improbables sont le cœur du film et on éprouve une énorme satisfaction à les voir, à eux-seuls, mettre le coup de grâce au farfadet. La réplique finale du petit Alex qui, bandant son lance-pierre, s’écrit «F**k you Lucky Charms!» en mode Schwarzenegger est du bonbon.
Cela dit, Alex et Ozzie ne sont pas les stars du film. Cette mention n’appartient à personne d’autre qu’au farfadet interprété d’une main de maître par Davis, qui éprouve visiblement un plaisir fou à jouer ce petit lutin maléfique. Ayant pratiqué lui-même la grande majorité de ses cascades et étant responsable presque à lui seul du second degré du film, il est la principale chose à sauver de cette saga. Même si ce premier opus ne lui laisse pas toute la latitude que lui permettront les suites pour cabotiner, il n’en demeure pas moins qu’il y est d’un incroyable charisme. On découvre dans ce premier film les prémisses qui feront du Leprechaun une icône comme sa manière de se présenter en parlant des boucles de ses souliers et surtout sa ténacité à répéter: «I WANT ME GOLD!»
Son personnage devient le parfait véhicule pour que la mise en scène se lance dans une série d’hommages au cinéma d’horreur qui aurait pu, dans un meilleur film, être les moments clefs où les plus jeunes s’initient au genre. À ce sujet, revoyez Leprechaun si vous êtes un cinéphile. On y retrouve des clins-d’œil pas trop appuyés, mais drôlement efficaces, à des classiques comme The Evil Dead, A Nightmare on Elm Street, Child’s Play et même Suspiria.
Malheureusement, le contexte entourant ces hommages, au lieu de nous faire sourire, nous fait plutôt dire: «Tu ne mérites pas ce genre de références, film!» Tout a été dit sur sa médiocrité: le scénario ne tient pas debout, le film n’est ni très drôle, ni effrayant le moins du monde et les deux acteurs principaux sont des coquilles vides. Jennifer Aniston, en particulier, est plutôt risible et on a l’impression que le film se moque constamment de son personnage. Elle se présente au début comme improbablement moderne pour une femme dans un film d’horreur. Elle est féministe, végétarienne et s’affiche comme une femme libérée. Cela dit, le déroulé prend étrangement un malin plaisir à la déconstruire de manière souvent non-volontaire (ce qui est à la fois drôle et déplorable). Au final, elle n’est qu’une autre victime et si elle n’était pas devenue connue par la suite, tous l’auraient oubliée.
On sort donc du visionnement de Leprechaun avec un sentiment mi-figue, mi-raisin. Le projet a été gâché par un trop-plein de gore commandé par les producteurs qui n’en voyaient pas le potentiel et qui voulaient capitaliser sur un public plus mature — ironique que la compagnie Lucky Charms se soit désistée à la dernière minute à faire apparaître sa marque destinée aux jeunes. Or, ce public n’en a pas eu non plus pour son argent vu le ton assez enfantin de l’ensemble. De plus, le scénario mal écrit qui n’installe aucune cohérence dans les pouvoirs improbables du lutin et les agissements des protagonistes fait décrocher. Bref ni assez bon et ni assez mauvais pour être à recommander. Cela dit, Warwick Davis est un pic, un cap, une péninsule, et parfois, un seul acteur peut développer l’intérêt d’une suite…
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