Le 21 avril prochain arrive en salle le troisième long-métrage très attendu d’Ari Aster, Beau is Afraid (Beau a peur) (lisez notre critique), produit à nouveau par la maison A24. Devenue emblème d’expérience cinéma hors pair, la compagnie s’est taillé une place toute particulière dans le genre horrifique. Pourquoi ne pas prendre quelques instants pour revisiter son répertoire impressionnant et ainsi se remémorer d’angoissants souvenirs!
Ascension rapide et fructueuse
La société indépendante de distribution A24 a été créée en 2012 par trois cinéphiles new-yorkais: Daniel Katz, David Fenkel et John Hodges. Pourquoi le nom A24? Tout simplement parce que Katz roulait sur l’autoroute italienne A24 lorsqu’il a eu la brillante idée de fonder la compagnie.
Cette dernière commence à faire parler d’elle en 2013 avec la sortie controversée du Spring Breakers d’Harmony Korine. Elle continue de gagner en notoriété avec la distribution de Ex Machina (2014), Room (2015), The Witch (2015) et plusieurs autres titres qui résonnent fort auprès du public.
En 2016, A24 se lance dans la production de son tout premier film, Moonlight, qui remporte trois Oscars, dont celui du meilleur film, l’année suivante. La maison produit également Everything Everywhere All at Once en 2022, qui a simplement tout raflé lors de la cérémonie des Oscars 2023. Il va sans dire, A24 a le gros vent dans les voiles.
S’élever au-dessus de la mêlée
C’est aussi de cette maison de distribution et production américaine qu’a émergé la qualification «elevated horror». Jugée prétentieuse par plusieurs, cette expression cherche à nicher certains films d’horreur dans une catégorie à part. Ce sous-genre répertorie des longs-métrages avec une esthétique plus léchée, une histoire mieux ficelée, une critique sociale plus poussée. Certains diront qu’il s’agit de films avec un penchant pour l’horreur plus «subtile» et moins «gratuite».
Mise à l’écran par des réalisateurs tels qu’Ari Aster (Hereditary, Midsommar), Robert Eggers (The Witch, The Lighthouse) et Alex Garland (Annihilation, Ex Machina, Men), cette horreur «élevée» se permet de mêler le thriller, au drame, au gore, en passant par le surnaturel et la science-fiction, le tout avec un souci marqué pour une histoire qui porte à réflexion et marque l’imaginaire.
Voici la liste des films distribués et/ou produits par A24 à mettre sur votre liste «À voir», si ce n’est déjà fait!
Il est à noter toutefois que A24 distribue ses films uniquement aux États-Unis. Au Canada, les titres nous sont livrés par d’autres maisons de distribution.
L’ordre dans lequel ils sont listés est établi en fonction de leur date de sortie.
Under the Skin (2013) de Jonathan Glazer
Une extraterrestre (Scarlett Johansson) aux apparences humaines traverse les rues d’Écosse en quête d’hommes qu’elle attirera dans ses filets pour s’emparer de leur corps et de leur nature humaine.
Mélangeant habilement science-fiction et horreur, Under the Skin propose une exploration troublante de la nature humaine et inhumaine. Le réalisme poignant du film tient au fait que la plupart des personnages ont été interprétés par des non-acteurs filmés à leur insu par des caméras cachées.
Pour celles et ceux qui aiment que rien ne se dise, mais que tout se ressente. Ne va pas sans rappeler You Won’t Be Alone (2022).
The Witch (2015) de Robert Eggers
Une famille pieuse du 16e siècle est tourmentée par une série de malheurs qui mettent leur foi et le lien qui les unit en dangereux péril.
Dans une cinématographie sombre et énigmatique, le réalisateur nous livre une lente, mais efficace histoire de sorcellerie aux avenues inattendues. À pas feutrés, l’horreur s’immisce dans le décor et s’agrippe à nous.
Pour celles et ceux qui aiment la fine cinématographie et l’horreur à combustion lente.
Green Room (2015) de Jeremy Saulnier
Un groupe punk est invité à donner un spectacle dans un bar néonazi de l’Oregon. Après leur performance, un des membres est témoin d’un meurtre. Le groupe au complet est alors confiné par une bande de skinheads qui compte bien effacer toute preuve et tout témoin.
Un huis clos dans lequel la violence se dévoile sans filtre, sans gêne. Empathique au sort des jeunes musiciens, on ne peut que souffrir du manque d’humanité flagrante des mises en scène qui ne jouent aucunement dans la dentelle.
Cœurs sensibles… peut-être passer votre tour!
The Blackcoat’s Daughter (2015) d’Oz Perkins
En attente de leurs parents qui doivent venir les chercher pour les vacances d’hiver, deux étudiantes d’une institution pour jeunes filles apprennent à se connaître. Une d’entre elles dévoilera une facette insoupçonnée qui mettra en péril bien plus que leur fragile amitié.
Qualifié d’atmosphérique et de terrifiant, ce film s’immisce sous notre peau et se campe loin dans notre mémoire. Grâce à une juxtaposition d’histoires bien ficelées, The Blackcoat’s Daughter se veut tout autant énigmatique que surprenant.
Pour celles et ceux qui veulent se faire servir un cocktail anxiogène ingénieusement mixé!
The Killing of a Sacred Deer (2017) de Yorgos Lanthimos
Une famille cossue menant une vie idyllique prend sous son aile un jeune homme ayant récemment perdu son père. La cohabitation tourne au cauchemar quand les intentions de ce dernier sont finalement mises au grand jour.
Dans un décor froid et à travers un jeu d’acteurs déroutant, le réalisateur propose un drame familial hors de tout sentier battu. Moins «horreur» que d’autres titres de cette liste, ce film s’y taille une place par sa nature dérangeante et la tournure brutale de ses événements.
Pour les amateurs de drames psychologiques à la sauce horrifique.
It Comes at Night (2017) de Trey Edward Shults
Dans un monde où l’humanité est en proie à une épidémie mortelle, une famille s’efforce de créer un quotidien rigoureux qui assurera la protection de ses membres. Ce fragile équilibre sera déstabilisé par la venue d’étrangers qui implorent refuge.
Dans une trame silencieuse et sombre qui mise davantage sur l’implicite que sur l’explicite, It Comes at Night livre une histoire troublante de survie et de solidarité humaine. La mise en scène calculée – qui utilise exclusivement un éclairage naturel – nous immerge complètement dans l’atmosphère du film.
Un film qualifié de «minimaliste» où la tension règne habilement.
Climax (2018) de Gaspar Noé
Une troupe de danseurs célèbre ses derniers jours de répétition. Pendant la fête, quelqu’un décide de «pimenter» le punch avec du LSD. Ce qui s’en suit est une réelle descente psychotique aux enfers.
Présenté à travers de longs plans-séquences (dont un de 42 minutes), le film met principalement sous nos yeux des danseur·euse·s sans expérience d’acteur·trice. Le fini est une mise à l’écran à la fois réaliste et surréaliste d’un bad trip étourdissant.
Gaspar Noé fidèle à lui-même, mais certainement pas pour tous!
Hereditary (2018) d’Ari Aster
Une famille se démantèle sous le poids du deuil après la perte de deux êtres chers. Rien ne va plus lorsque de lourds secrets font surface et révèlent le côté obscur qui tisse les générations.
Rares sont les films qui réussissent à créer une angoisse aussi étouffante. Du cadrage des scènes, en passant par les mouvements de caméra et la trame sonore, tout est judicieusement mis en place pour faire monter bien haut l’anxiété et la maintenir sans relâche. Avec l’impeccable (inégalée!) Toni Collette choisie pour camper le personnage central, Hereditary a tout pour atteindre les hauts sommets de l’horreur.
Parfait pour les fervents de détours abrupts dont personne n’est à l’abri.
The Lighthouse (2019) de Robert Eggers
Sur une île lointaine de Nouvelle-Angleterre, deux gardiens de phare doivent conjuguer avec la solitude et l’isolement. Dans un espace partagé, ils seront confrontés un à l’autre, mais également à eux-mêmes.
The Lighthouse se veut un mélange hallucinogène de rêve et de réalité. Poignant, anxiogène et loufoque à la fois, le film (en noir et blanc!) surprend et subjugue grâce à des performances on ne peut plus crédibles de la part de Willem Dafoe et Robert Pattinson. Un duo improbable, mais irréprochable!
Dans une balance amour/haine qui a certainement divisé le public, ce film atypique ne laisse personne indifférent.
Saint Maud (2019) de Rose Glass
Une jeune infirmière en quête de foi se donne comme mission de «sauver» une de ses patientes, une ex-danseuse atteinte de cancer. Cette visée divine se transformera peu à peu en une obsession qui la mènera à décrocher dangereusement de la réalité.
Tel un papier sablé à grains fins, Saint Maud écorche tranquillement, mais sûrement. Une œuvre d’une sensibilité déstabilisante qui nous plonge droit au cœur du désarroi humain. Avec une finale à jamais gravée dans notre mémoire, le film ne peut tomber dans l’oubli.
Pour celles et ceux qui aiment suivre le courant qui mène tout droit à la folie.
Midsommar (2019) d’Ari Aster
Un jeune couple en péril accompagne un groupe d’amis dans une fête païenne en Suède. Ce qui devait être une simple excursion s’avère un plongeon tête première dans un univers sordide à souhait.
Prenant place en plein jour où le soleil brille de mille feux, l’histoire n’attend pas la brunante pour introduire l’horreur et nous y expose sans retenue et sans crier gare. Cet aspect hors du commun distancie drastiquement Midsommar de la plupart des films d’horreur grand public. La descente aux enfers est racontée dans un tourbillon malaisant de situations plus étranges les unes que les autres.
Quand on cherche (et trouve!) quelque chose de complètement différent!
X (2022) de Ti West
En 1979, un groupe de jeunes cinéastes loue une maison dans la campagne du Texas pour y tourner un film érotique. Leurs hôtes, un couple âgé aux apparences douteuses, s’avéreront beaucoup plus menaçants qu’ils laissent présager.
Dans un style «slasher» réussi, X respecte le rythme soutenu et la montée en tension du sous-genre. On sait pertinemment que le massacre gronde, mais le temps pour y arriver s’étire juste assez pour nous garder en haleine jusqu’à l’inévitable.
Il va sans dire, amateurs de carnage… celui-ci est pour vous!
Pearl (2022) de Ti West
Pearl rêve de devenir une star. Prise malgré elle dans une maison de campagne isolée avec une mère austère, un père paraplégique et un mari parti à la guerre, elle fera tout en son pouvoir pour accéder à ses grandes ambitions.
Le jeu mis à l’écran et la palette de couleurs choisie font un très réussi clin d’œil au cinéma des années dépeintes. Une autre belle immersion dans le genre slasher qui nous rappelle que personne n’est à l’abri quand la folie prend le dessus.
Moins sanglant que X, mais tout aussi captivant!
Men (2022) d’Alex Garland
Une jeune femme en deuil loue une maison dans la campagne reculée d’Angleterre pour y trouver un peu de calme. Peu de temps après son arrivée, elle sera tourmentée par les hommes étranges qui rôdent dans les environs.
Dans une cinématographie magnifique, le film propose une troublante histoire de deuil qui progresse subtilement, mais sûrement en un grand cri du cœur face à la masculinité toxique et ses dangereux impacts sur le corps et l’esprit. À travers un jeu d’acteurs impeccable, Men raconte une histoire d’âme hantée par plus d’un fantôme.
Symbolisme, quand tu nous tiens!
Bodies Bodies Bodies (2022) d’Halina Reijn
Un groupe d’amis se réunit dans une villa le temps d’un party. Pour rehausser la soirée, ils décident de jouer à Bodies Bodies Bodies, un jeu de rôle de type «trouver l’assassin». Le divertissement prendra une tournure sinistre lorsqu’un des joueurs est réellement trouvé mort.
Dans un style horreur d’apparence «déjà vue» où se multiplient les situations sanglantes dans une confusion grandissante, Bodies Bodies Bodies tire son épingle du jeu en nous proposant une conclusion à la fois surprenante et dérisoire.
Quand on a le goût d’un film culture pop qui ne se prend pas au sérieux, mais qui parvient à se distinguer du lot.
Ce top 15 vous semble juste? En avons-nous par hasard oublié ou auriez-vous troqué un titre pour un qui se trouve sur cette liste?
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