Au courant des quize dernières années, l’auteur François Lévesque a publié pas moins de dix romans, noirs plus souvent qu’autrement, parus principalement aux éditions Alire (aux côtés des Patrick Senécal, Joël Champetier et autres Jonathan Reynolds). Depuis un bon moment déjà, on peut également lire sa plume effilée de journaliste dans les pages du quotidien Le Devoir, où il dissèque fort habilement le septième art. Paru la semaine dernière chez Somme Toute, Histoires de films, son tout nouveau bouquin, est en mode documentaire et devrait sûrement vous plaire.
Lévesque nous propose une collection de textes des plus fouillés, célébrant des classiques en tous genres du cinéma international. Si l’on retrouve plusieurs films d’auteur·trice·s n’ayant rien à voir avec les sujets de prédilection de nos lectrices et lecteurs, sachez qu’il est véritablement l’un des nôtres: près de la moitié de textes portent sur des œuvres phares du cinéma à saveur horrifique ou d’anticipation.
À voir et revoir (les classiques)
Mais pourquoi diantre un autre recueil de critiques? C’est que celui-ci analyse avec brio chacun de ses sujets, les replaçant dans le contexte de leurs sorties, en y juxtaposant mentions de scènes mémorables, citations de critiques d’époque et d’analystes érudits, en commentant le tout avec les sensibilités d’aujourd’hui. Sans oublier de nommer ce qui a inspiré l’auteur·trice du récit (ou du roman à l’origine du scénario, si adapté). Avec toujours le mot juste, et d’on ne peut plus fines réflexions.
L’ouvrage regroupe, dans un premier temps, une sélection de versions augmentées d’articles parus dans Le Devoir depuis début 2022. Ce sont des textes de la série A Posteriori le cinéma, grâce à laquelle Lévesque a commémoré l’anniversaire (25e, 35e, 40e et cetera) de films qu’il affectionne particulièrement et qui ont changé l’histoire du cinéma. La deuxième partie se concentre ensuite sur des articles similaires publiés ultérieurement.
Dans les deux cas, on retrouve des longs métrages de tout acabit (sortis hier ou jadis naguère) ayant été maintes et maintes fois vantés dans le passé. En vrac, y passent drames ou comédies, tels que Titanic, Le Dîner de cons, The Piano et autres Groundhog Day, mais aussi des œuvres immortelles plus brutales ou sanguinolentes, comme A Clockwork Orange et Bonnie and Clyde.
Culture culte et bien au-delà
Les fans d’horreur (ou de thriller) se régaleront assurément, car plusieurs films dits cultes, choisis avec soin, sont ici revisités. Comme «l’aussi sanglant que poétique» Near Dark (1987), ce western vampirique de Kathryn Bigelow, future première réalisatrice oscarisée (pour The Hurt Locker). Il est notamment question de son utilisation contrastée de la musique et de son casting emprunté à Aliens.
Quant au Sisters (1972) de Brian de Palma, Lévesque met l’accent sur l’impact qu’eut le cinéma d’Alfred Hitchcock sur ce dernier. On y parle aussi de la «fantasmagorie macabre» qu’est Suspiria (1977) de Dario Argento, un film près du songe, aussi chamarré qu’envoûtant, selon l’auteur.
On y examine également le moult fois oscarisé The Silence of the Lambs (1991), ses suites et dérivés. Lévesque nous rappelle notamment que l’adaptation du roman de Thomas Harris «relève autant du drame policier que du film d’horreur». Deliverance (1972), alias le père du récit de survie (précurseur du slasher forestier), est également au programme.
Aux bals des masques
De même que le premier coup de circuit de John Carpenter, Halloween (1978), une «expérience viscérale», dont la «mise en scène est d’une précision redoutable». Par ailleurs, en plus d’examiner l’archétype de la final girl, est inclus un deuxième texte survolant la franchise. Sans oublier l’influent Night of the Living Dead (1968), une «métaphore de l’Amérique d’alors». Lévesque remarque habilement que son regretté réalisateur George A. Romero a réussi à «créer une œuvre à l’épreuve du temps», à l’instar de ses pourrissants antagonistes, des «trépassés qui refusent de mourir».
Sachez que ceux et celles qui adorent la science-fiction ne seront pas en reste, grâce à de délectables textes portant sur de novateurs films comme Dark City, Blade Runner, Jurassic Park et en particulier The Thing. Ce dernier est honoré dans un texte savoureux opposant le désormais classique de Carpenter au E.T. de Steven Spielberg, tous deux sortis en juin 1982 (!).
Bref, Histoires de films, c’est une bien belle sélection de textes fouillés célébrant le cinéma et (certains de) ses auteur·trice·s, qui plaira aux cinéphiles les plus aguerris et ouverts d’esprit. Et qui permettra aux néophytes de faire leurs devoirs aussi!
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