Bien qu’il ne s’agisse pas d’un film d’horreur proprement dit, le tout dernier film des réalisateurs Lucien Castaing-Taylor et Verena Paravel aborde un contenu plutôt horrifiant: le meurtre d’une jeune femme par Issei Sagawa, un japonais qui a obtenu sa notoriété au début des années 80 pour avoir mangé sa victime. Présenté en première nord-américaine au TIFF plus tôt ce mois-ci, on explore ici un documentaire qui ne laisse personne indifférent.
Les créateurs de cette oeuvre ont connu le succès grâce à leur précédent Leviathan, qui faisait part des périples des pêcheurs, jouant de techniques expérimentales et novatrices. Dans leur nouvel essai Caniba, l’expression artistique est parfois poussée trop loin. Des plans statiques silencieux, changeant légèrement de focus, s’étirent pendant plusieurs minutes. Le criminel, qui vit libre au Japon, et ce depuis des décennies, est aujourd’hui réduit à la quasi paralysie. Il est aidé de son frère, qui est plutôt loquace quant à son dégoût pour les propos et histoires qui sont proliférés sur le sujet. Ce regard sur la relation familiale et parfois rivale de ces deux hommes ainsi que sur leurs déviances sexuelles respectives offre un angle intéressant au documentaire, qui le différencie ainsi des efforts cinématographiques ayant précédemment tenté d’aborder le même sujet.
Bien qu’il traite d’un thème répugnant, le film n’en demeure pas moins fascinant. Sagawa prétend avoir tué la femme parce qu’elle aurait refusé ses avances, un cas qui fait écho encore des situations d’actualité. La différence, bien entendu, est tout le reste, soit le fétichisme de la chair humaine, le plaisir sexuel qui n’est assouvi seulement que par la consommation d’un autre être. C’est ce désir pervers qui a fait de l’homme une célébrité au Japon et qui lui a permis d’écrire un livre graphique sur le crime qu’il a commis, en plus de tenir un rôle dans un film pornographique. Les deux documents sont d’ailleurs présentés à travers le film, une façon de démontrer l’étendu de la dépravation de cet homme, tout en saisissant ce prétexte pour se permettre de choquer l’audience au maximum.
Au final, il est assez facile pour les réalisateurs d’ébranler leur public considérant le sujet qu’ils nous présentent, mais au-delà du sensationnalisme, le contenu semble s’essouffler rapidement. Au fur et à mesure que les mêmes propos sont répétés, les longs zooms muets sur le visage d’Issei Sagaw prennent une forme moins artistique et on regrette que ces scènes aient une place aussi importante, alors qu’on aurait préféré une oeuvre quelque peu plus substantielle. Caniba n’est certainement pas un film qui plaira à tous et certains passages pourront même ébranler les cinéphiles les plus téméraires.
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