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Woman of the Hour. (D-G) Tony Hale est Ed, Anna Kendrick est Sheryl et Daniel Zovatto est Rodney dans Woman of the Hour. Cr. Leah Gallo © 2024.

[Critique] « Woman of the Hour » : guide de complaisance pour femmes en danger; un premier film réussi pour Anna Kendrick

Anna Kendrick (Twilight, Pitch Perfect, A Simple Favor) troque son chapeau d’actrice expérimentée pour celui de réalisatrice avec le film Woman of the Hour (Une femme en jeu). Présenté en première mondiale au TIFF l’an dernier, le film arrive enfin en salle aujourd’hui.

Inspiré d'un fait réel, Woman of the Hour retrace les abus immondes et les meurtres du tueur en série Rodney Alcala (interprété par Daniel Zovatto, The Pope's Exorcist). Plus connu comme le « Dating Show Killer », l'homme a gagné ce surnom en remportant un jeu de rencontre télévisé avec Cheryl Bradshaw (Anna Kendrick), une aspirante actrice, vers la fin des années 1970.

Pas de blâme porté aux victimes

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Trop de contenu true crime emprunte aux codes sensationnalistes de la fiction, laissant de côté un enjeu éthique important : les victimes impliquées et leur famille. Fréquemment, nous assistons à de disgracieuses représentations des faits, où l’axe est orienté vers le portrait du criminel en question. La série Netflix Dahmer de Ryan Murphy, qui semble parfois même glorifier le célèbre cannibale, en fait un bon exemple. Critiquée amèrement par les proches des victimes qui n’ont pour la plupart jamais été contactés en amont de la réalisation, la série a fait polémique. Oui, ces oeuvres sur les crimes réels abreuvent la curiosité morbide de l’humain qui cherche essentiellement à comprendre la psychologie d’un être capable d’accomplir le pire : mais à quel point mettons-nous en lumière ces fautifs pour notre propre divertissement?

Difficile d’établir une échelle de moralité par rapport à ce sujet si polarisant, mais ce qui est certain, c’est que Woman of the Hour aborde la question avec intelligence. Kendrick opte pour un angle plus sensible, où les expériences des femmes impliquées de près ou de loin dans l’affaire sont mises de l’avant. À travers toutes sortes d’instances et avec différents hommes, nous sommes témoins des comportements de complaisance dont les femmes font preuve quand elles sont inconfortables. Ces contournements de politesse qu’elles n’ont pas le choix de prendre pour éviter de déplaire, de froisser ou au pire d’être tuées, sont omniprésents dans le narratif.

Avec le personnage de Cheryl, on explore l’hypersexualisation des femmes dans le milieu du cinéma à travers les années 70 avec des réalisateurs désobligeants ou des animateurs télé condescendants. Grâce au personnage de Laura (Nicolette Robinson), présente dans le public du jeu télévisé et reconnaissant Rodney comme le suspect recherché pour le meurtre de son amie, on observe l’incompétence du système policier qui n’écoute pas les voix de femmes qui crient au danger. Puis avec toutes les autres victimes de Rodney, on constate simplement qu’au-delà du charisme initial, un monstre peut toujours se cacher sous la peau d’un homme.

Le jeu de la peur

Le contexte du jeu télévisé est une étonnante mise en abime (et déroutante quand on se rappelle qu’il s’agit en partie d’une histoire vraie), car pour Rodney Alcala, tout cela semble être un jeu du chat et de la souris où il, le prédateur, cherche sa proie. Ce motif est approfondi avec son intérêt pour la photographie, qu’il utilise comme un appât pour ses victimes. Vulnérables derrière l’objectif, les femmes doivent suivre les directions de Rodney : c’est un moyen de contrôle qui lui permet aussi de capter des moments de torture brutaux pour son plaisir personnel.

Woman of the Hour est un film relativement simple dans sa construction, qui ne tourne pas autour du pot. Son efficacité encourage l’argument anti-sensationnel élaboré en introduction, lui pourvoyant des points supplémentaires. Les costumes et décors bien réussis nous plongent au cœur de l’époque et les performances des interprètes donnent froid dans le dos — dans le bon sens.

C’est une première réalisation accomplie qu’Anna Kendrick peut signer ici. Il ne s’agit pas simplement que d’un film basé sur un true crime, mais un lieu où les femmes pourront s’identifier dans les exemples de faux rire, de détournements dans les conversations, de commentaires misogynes esquivés par un sourire et de tout autres mécanismes qui permettent de naviguer dans leurs relations avec les hommes qui les rendent mal à l’aise.

Note des lecteurs0 Note
Pour les fans...
de crimes réels
d'ambiance des années 70
de jeux télévisés
3.5
Note Horreur Québec

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