Joe Begos est passé maître dans l’art du collage et les fétichistes de l’horreur des années 80 en redemandent. Après Ferrara dans son récent Bliss ou Cronenberg avec The Mind’s Eye, le voilà maintenant en train de revisiter le cinéma de John Carpenter via VFW. Mais si l’on regarde au-delà des nombreux emprunts de Begos, qu’a-t-il à offrir?
L’acronyme VFW désigne les vétérans de l’armée états-unienne qui ont été déployés en sol étranger. Entre les murs de leur local, de vieilles gloires du cinéma de genre se rassemblent. Fred Williamson, William Sadler, Martin Kove, Stephen Lang et David Patrick Kelly personnifient d’anciens militaires. Quel bonheur de retrouver tout ce beau monde dans un même film!
Nos vétérans des plateaux doivent défendre le safe space où ils boivent et évoquent leur glorieux passé contre les assauts de punks qui ont investi le cinéma d’en face. Ces derniers marchandent une drogue dangereuse qui aurait eu sa place dans une suite de Street Trash. Quand une jeune femme s’échappe avec une partie de leur stock et demande la protection des soldats, le choc est inévitable entre anarchistes et défenseurs de la liberté vieillissant.
En regardant de près qui figure à la liste des producteurs, on s’imagine qu’ils cherchaient peut-être à tenir avec VFW un discours sur l’assainissement du cinéma de genre à l’ère politiquement correcte. Si c’était le cas, la transmission s’est perdue à travers cette énième variation sans imagination d’Assault on Precinct 13, ses filtres roses et sa trame sonore de circonstance.
Comme bien d’autres «hommages» à la série B, le film est trop conscient de lui-même pour prétendre à la sincérité et ses créateurs ne semblent même pas comprendre ce qui faisait le succès du cinéma qu’ils calquent.
L’abus de style cherche à cacher une absence de substance mais rien ne peut faire illusion quant à la vacuité de ce scénario. Si un Larry Cohen aurait su imaginer un dernier tour de piste glorieux aux vieilles gueules qui peuplent ce casting, les mêmes acteurs manquent étrangement de charisme alors qu’ils rattrapent le temps perdu autour du bar de VFW. Les passages obligés s’accumulent, alors que les antagonistes du film sont quant à eux caricaturaux et inintéressants.
Bliss du même cinéaste étant paru il y a quelques mois à peine, on se surprend à réaliser qu’il s’agissait d’un film plus abouti visuellement… alors qu’on aurait cru de VFW qu’il était le projet le plus ambitieux des deux. Le côté crasseux de la production cherche à évoquer les films new yorkais d’une certaine époque mais paraît factice. Nombreuses, les séquences de tension et de violence n’ont rien de remarquable. Les références visuelles à Carpenter sont superficielles, alors que s’inspirer davantage de l’intelligence de sa mise en scène est ce qui aurait pu servir ce récit. Le montage n’est pas toujours au point.
Le désir qu’ont certains cinéastes d’horreur de vivre dans le passé ne joue pas toujours en leur faveur. Des films comme It Follows et Us prouvent régulièrement que l’on peut emprunter à ceux qui ont construit le cinéma d’horreur tel qu’on le connaît afin de créer quelque chose de nouveau. À l’inverse, VFW se perd dans sa séance de scrapbooking fétichiste et ne parvient jamais à développer sa propre voix.
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