Né dans les années 1970, ce n’est réellement qu’en 1981 que le slasher est devenu une tendance populaire au sein du 7e art. Eh oui, déjà 40 années ont passé depuis la plus grande cuvée du sous-genre horrifique.
Ainsi, Kristof G. passe en mode «On rembobine» afin de revisiter pour vous une douzaine des plus excitants, stressants et sanglants slashers sortis en 1981. Rendez-vous chaque dernier vendredi du mois, pour bien débuter votre «week-end de terreur»…
Le maniaque
AVERTISSEMENT: si vous n’avez pas vu le film, on vous suggère d’arrêter votre lecture dès maintenant et d’aller illico le visionner (vraisemblablement sur YouTube, car le film est assez introuvable aujourd’hui, n’ayant point été réédité depuis un bon moment), car on débute la dissection du synopsis. Après The Burning, et My Bloody Valentine, on s’attaque à Home Sweet Home, alias La Nuit du saigneur en version française. Ce qui est le fun avec visionner un film pour la toute première fois, c’est l’élément de surprise, qui n’est plus là lorsqu’on voit à nouveau nos petits et grands classiques. Avec ce tout petit slasher, ce qui saute aux yeux en premier, c’est le niveau de qualité. Sachez qu’on a ici affaire à un beau petit navet, bien con et fauché, à classer parmi les nanars si mauvais qu’on rit sur toute la durée. Le genre qu’on apprécie habituellement encore plus avec quelques bières et des potes en fin de soirée.
Dans La Nuit du saigneur (ou La Nuit du seigneur (sic), tel qu’il apparaît à l’écran peu après la septième minute), on suit les aventures meurtrières d’un “dangereux malade mental âgé de 26 ans, Jack John (ou Jay Jones en anglais), qui s’est échappé d’un hôpital psychiatrique, laissant derrière lui un bain de sang; il aurait assassiné plusieurs personnes et blessé l’un de ses gardiens”, qu’on apprend alors qu’un bulletin de nouvelles radiodiffusé joue dans la bagnole de sa première victime, qui buvait une petite canette de Budweiser bien tranquille dans son char, dans un stationnement sur le bord de l’autoroute, toi chose.
Notre très agressif molosse à gros bras (Jake Steinfeld, aperçu comme chauffeur de taxi au début de Coming to America) n’est pas juste dément: c’est aussi un drogué notoire, qui étonnamment s’injecte directement dans la langue sa dose de stupéfiants. Il fait 6 pieds 2 pouces, pèse 243 livres et aurait également tué ses parents (toujours selon la radio). Et il ressemble pas mal à une version non verdâtre de l’Hulk de la vieille série télé avec Lou Ferigno. Fâché-fâché. D’ailleurs, après avoir volé une magnifique station wagon familiale en similibois, il écrase une petite vieille qui traversait la rue avec ses sacs d’épicerie, en rigolant comme un fou, comme dans The Toxic Avenger! Avec en prime un bel arrêt sur image doublé d’un zoom sur le visage horrifié de la mémé!
Pendant ce temps, une dizaine de fêtards vaguement excités se rendent au ranch du vieux Bradley (Don Edmonds), pour l’Action de grâce. Plus connu comme réalisateur de films d’exploitation cultissimes (notamment Ilsa, la louve des SS; Ilsa, gardienne du harem des rois du pétrole; et de la production Troma Tomcat Angels), Edmonds porte ici plusieurs chapeaux: il est également producteur… et superviseur des cascades! Euh… OK…
«Spectaculaire» (pas vraiment)
Mais qui est donc ce raté au visage barbouillé comme un pierrot avec sa guitare et son ampli en bandoulière? C’est Tête à Claque / Mistake (Peter de Paula), le fils de Bradley, qui s’amuse à faire de la magie pour une fillette (Vinessa Shaw; Hocus Pocus, Eyes Wide Shut et la refonte de The Hills Have Eyes), lorsqu’il ne tourmente pas le reste des invités avec son maquillage de KISS façon Dollarama et ses solos à la con.
Mais la vraie de vraie star de ce film un peu prude (y a pas trop de peau, yo), c’est véritablement le tueur, et ce, malgré ses meurtres pas très graphiques. C’est que notre culturiste actif/agressif débarque au ranch par hasard, bien décidé à rigoler un coup en dégommant quiconque se mettrait en travers de son chemin. Au menu, on a doit à une poignée de strangulations au rabais, quelques victimes poignardées avec un beau couteau de Rambo (dont une fille en soutif), un peu de baston, ainsi que deux mises à mort plutôt originales.
Alors qu’on se réjouit de voir enfin être mis hors d’état de nuire le maquillé susmentionné (mort électrifié à la 55e minute, yé), on éclate de rire lorsque notre meurtrier saute sur un capot d’auto tel un lutteur se lançant de la troisième corde, avalant Bradley qui était en train d’essayer de subtiliser… la batterie (hi hi)! Qui plus est, le tout est fait en riant comme un cinglé à gorge déployée, avant que l’intuable malabar ne soit poignardé et que les policiers ne débarquent pour le fusiller. Saviez-vous qu’après avoir incarné ce suant, grognant et musculeux tueur, Steinfeld est devenu un entraîneur professionnel qui aurait eu comme clients Steven Spielberg et Harrison Ford sur les 2e et 3e Indiana Jones? Votre scribe non plus et c’était très bien ainsi.
Sucré? Salé? Sûr?
Alors, c’est écoutable? Comme mentionné d’entrée de jeu, c’est le genre de film dont il vaut mieux apprécier l’incompétence et les lacunes pour avoir un minimum de fun. En quelque sorte, La Nuit du saigneur, c’est comme le Maniac (1980) des pauvres, qui ne livre jamais vraiment la marchandise, avec son tueur en série pas très crédible (tout le contraire du jeu troublant de feu-Joe Spinell, des SFX salissants de Tom Savini et de la réalisation très crue de William Lustig). D’emblée, en plus d’une risible trame sonore nous égratignant les tympans avec ses clichés éventés, le micro-budget du film est d’une évidence flagrante: le ranch a l’air d’un motel repeinturé. Au niveau des performances, on nage dans l’amateurisme, avec en prime beaucoup (beaucoup) de criage. Du coup, ses dialogues minables, son manque d’action et ses personnages des plus morons (dont une paire de flics bidons) sont une gracieuseté du scénariste — et assistant-réalisateur — Thomas Bush, alias pas grand-chose sauf «gars de son» sur Evil Dead 2.
Il est clair que la caméra instable de Don Stern (Wolfen, Evils of the Night) n’aide pas du tout, alors que c’est si mal éclairé qu’on peine à voir ce qui se passe la moitié du temps. On doit par ailleurs remercier l’inexpérience de Nettie Peña pour la réalisation inepte, le rythme asymétrique et le montage pauvre du long-métrage (la réalisatrice se recycla dans le documentaire et la photographie). Aux effets spéciaux, nous avons Charles Spurgeon (qui aurait travaillé sur Jaws), alors que son assistant Steve LaPorte eut une bien meilleure carrière au niveau maquillage: le premier n’a retravaillé que sur un film (My Demon Lover) alors que ce dernier a par la suite enchaîné les classiques (The Howling, Swamp Thing, The Goonies, The Golden Child, Spaceballs, Beettlejuice, Edward Scissorhands, The Lost Boys, The Running Man, Terminator 2…).
Au final, on se demande qui de Spurgeon ou LaPorte fut le chanceux qui a eu à électrocuter cet énervant de mime guitariste… XD
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