Malgré les actes exécrables de son réalisateur (il faut appeler un chat un chat), Rosemary’s Baby de Roman Polanski reste un pionnier de l’horreur réaliste. Basé sur le roman éponyme de l’auteur Ira Levin, paru en 1967, le film qui sort un an après est le préféré de plusieurs et pour de bonnes raisons. Il s’agit d’une véritable plongée psychologique, qui nous porte dans une paranoïa indescriptible avec des mécanismes cinématographiques simples, mais efficaces et une ambiance graduellement affolante.
Pour ceux et celles qui ne sont pas familier·ère·s avec sa prémisse, il est question d’un jeune couple, Rosemary (Mia Farrow) et Guy Woodhouse (John Cassavetes), qui emménage dans un appartement à New York en 1965. Guy est un acteur à en devenir et Rosemary espère devenir une mère de famille. Ils rencontrent alors leurs voisins, Minnie (Ruth Gordon) et Roman Castevet (Maurice Evans) qui sont initialement gentils, mais deviennent intrusifs et accaparants lorsque Rosemary tombe finalement enceinte. Essentiellement : c’est un film sur la perte de contrôle absolue.
Apartment 7A fut annoncé comme un prequel au film de Polanski. Réalisé par Natalie Erika James, qui signe Relic en 2020, le long métrage reprend en effet le même contexte que l’original. On retrouve les bons vieux personnages de Minnie (Dianne Wiest) et Roman Castevet (Kevin McNally) et on en introduit des nouveaux soit Terry Gionoffrio (Julia Garner) et Alan Marchand (Jim Sturgess).
Terry est une ambitieuse jeune danseuse qui rêve de gravir les échelons pour atteindre la gloire. Après une blessure malencontreuse, elle cherche à se reconstruire autant physiquement que professionnellement : une tâche ardue dans les années 60, où les femmes peinent à être prises au sérieux dans le milieu du travail, et surtout celui de la performance. Elle rencontre un couple qui lui offre tout ce dont elle a besoin sur un plateau d’argent, mais à quel prix?
La femme au foyer vs la femme de carrière
Contrairement à Rosemary, Terry souhaite percer dans le milieu du travail : elle veut danser. On fait face à une femme carriériste, centrée sur son succès : un clash avec la protagoniste précédente qui n’avait que l’intention d’être mère. C’est une perspective plutôt pertinente, car l’histoire originale, derrière sa facette satanique, peut être interprétée comme un symbole féministe. On peut y lire sous la surface des thèmes de perte de contrôle de son propre corps, d’abus sexuels, de maternité non désirée et de « décervelage » (ou gaslighthing). Mais même si ses rêves sont divergents, Terry n’est pas épargnée de tout ça et subit le même sort que Rosemary (ou presque).
Malgré l’excellent jeu de Julia Garner, on ne connait pas suffisamment les motivations et le passé de la danseuse pour s’y attacher. Apartment 7A ne creuse pas assez sous sa surface pour nous faire comprendre parfaitement les raisons de sa complaisance avec les Castevet, ou ses motivations personnelles. La construction psychologique du personnage semble loin de celle que l’on accorde à Rosemary et c’est franchement dommage.
Un copié-collé
Le personnage de Terry Gionoffrio n’est en fait pas sorti de nulle part : on en fait mention dans une scène de Rosemary’s Baby, où Rosemary rencontre Terry dans la buanderie du bloc appartement, au sous-sol. Les deux femmes discutent de la bonté des Castevet, qui accueillent la jeune femme ayant souffert de problèmes de consommation. Natalie Erika James reprend ce personnage pour en faire sa protagoniste : une idée particulièrement intéressante sur papier.
Malheureusement, la plus grande lacune de ce film est sa prévisibilité. Le film de Polanski a mis la table, fournissant à Apartment 7A un univers prêt-à-manger. C’est justement pour cette raison que nos attentes sont trop élevées et lorsque confronté·e·s au narratif de la nouvelle œuvre, qui est pratiquement identique à l’original, vous risquez d’être déçu·e·s.
Pour des yeux nouveaux qui n’ont jamais vu Rosemary’s Baby, cet antépisode pourrait plaire parce qu’il est visuellement bien réussi et contient de bonnes performances, mais autrement, nous sommes face à du copié-collé…
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