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[Fantasia 2024] « Shelby Oaks » : idées noires et sœur perdue

Si vous avez navigué sur le YouTube cinéma des années 2010, il y a de fortes chances que vous ayez croisé la chaîne de Chris Stuckmann. Critique et vidéaste, après plus de dix ans sur la plateforme, Chris réalise enfin son premier long métrage, le très attendu Shelby Oaks. Si l’aura de mystère flottant autour du projet était déjà intrigante, la curiosité et l’excitation se décuplent quand le légendaire réalisateur et producteur Mike Flanagan se joint au projet. Encore plus impressionnant, le distributeur américain Neon, responsable des cinq derniers lauréats de la très convoitée Palme d’or du Festival de Cannes décide, lui aussi, de s’impliquer dans l’aventure. Mais est-ce que toute cette attention est gage de qualité?

Plusieurs années après la mystérieuse disparition d'un groupe d'enquêteurs du paranormal, Mia garde toujours espoir de retrouver sa sœur en vie. Alors que la police a classé l'affaire depuis longtemps et que le souvenir du groupe s'estompe des mémoires, des coups à la porte et une mystérieuse cassette relanceront l'enquête...

Alors, qu’est-ce que ce Shelby Oaks? Si son réalisateur nous vendait le film comme un found footage doublé d’un faux documentaire, ce n’est pas tout à fait le cas. À partir d’un certain moment, un changement s’opère et le film se transforme en enquête occulte très sombre dans lequel Mia va tenter de comprendre ce qui est arrivé à sa sœur en retraçant ses pas. Si le format est assez classique en soi, Stuckmann arrive à en faire quelque chose d’étonnamment profond, de très personnel et, surtout, de perturbant.

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En premier lieu, tout dans Shelby Oaks passe par l’ambiance. Si le film a son petit lot de jump scares plutôt inefficaces, l’horreur de l’histoire se fait ressentir à travers une direction photo fantastique et une mise en scène lente et atmosphérique. En effet, l’histoire prend son temps. Que ce soit dans l’installation de ses enjeux, la progression de son horreur ou la construction de son atmosphère, le réalisateur n’est pas pressé. Mais bien que poser une atmosphère glauque et malsaine soit important pour le succès d’un film d’horreur, il faut savoir se doser. On peut mettre toute la musique inquiétante qu’on souhaite, mais après un certain temps, observer un personnage explorer des lieux abandonnés pendant plusieurs minutes sans qu’il ne se passe quoi que ce soit peut devenir lourd. Malgré une mise en scène millimétrée au possible et la superbe aptitude que démontre Stuckmann pour le cadrage et le découpage, il étire beaucoup trop la sauce dans les scènes d’enquête qui finissent par devenir un brin ennuyeuses. C’est encore plus problématique quand on sait que ces séquences forment le cœur du récit.

Cela dit, une fois que le film a enfin terminé de prendre tout ce temps et qu’il relâche les chiens, les véritables qualités de Shelby Oaks montrent le bout de leur nez. Le réalisateur explore dans son récit des thèmes d’une profonde noirceur, qui lui sont très personnels. C’est là qu’on découvre la réelle beauté et la plus grande qualité de Shelby Oaks. Le film porte en lui une remarquable honnêteté et une belle vulnérabilité de la part de son cinéaste. Le tout se ressent comme un puissant et violent exorcisme de ses démons personnels qu’il fallait expier depuis longtemps. Il devient alors difficile de ne pas pousser un long soupir de soulagement une fois que le générique de fin arrive et que la poussière commence à retomber.

Il est aussi important de mentionner la sublime direction d’acteur·trices. Camille Sullivan (Hunter Hunter), interprète de Mia, donne une performance remplie d’émotions, de sincérité et de grande force intérieure. Le reste de la distribution est tout aussi solide, mais mieux vaut ne pas trop en dire pour garder la surprise intacte.

Shelby oaks

Ne cachant jamais ses influences, Stuckmann s’inspire grandement de classiques de l’horreur tels que The Blair Witch Project et Lake Mungo ou encore de l’excellent Zodiac de David Fincher. Si les références sont là, le film n’en abuse jamais, que ce soit dans sa mise en scène ou dans son écriture. Une écriture, donc, qui rappelle beaucoup le cinéma horrifique des années 1990 et 2000 avec ses nombreux films d’enquête. Malheureusement, cet aspect date un peu la production, ne modernisant pas particulièrement le style dont elle s’inspire. L’ensemble n’est pas aidé par une finale qu’on peut prédire très facilement après l’apparition d’un certain élément du récit. Bien que cette fin soit logique thématiquement, on aurait souhaité un peu plus d’originalité. Par contre, le scénario se rattrape dans la construction de ses personnages qui, sans être d’une immense profondeur, arrivent à être tridimensionnels et intéressants à suivre.

Au final, Shelby Oaks est un bon film d’horreur avec de grandes qualités et de grands défauts. C’est un premier effort honnête et qualitatif qui lancera, on l’espère, une longue et bonne carrière. Ses thématiques, son honnêteté et sa noirceur resteront dans les esprits longtemps après sa fin.

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Pour les fans...
d'ambiance glauque
d'enquêtes paranormales
de projets indépendants et personnels
3.5
Note Horreur Québec

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