Imaginez une histoire d’action et de vengeance classique, avec tous ses tropes et ses clichés scénaristiques habituels. Une sorte de John Wick surchargé d’action, où le personnage principal serait une grand-mère désabusée qui veut prendre sa revanche après qu’elle se soit fait escroquer par la maison de retraite dans laquelle elle se fait admettre. C’est ce que nous propose The G, une film où le réalisateur montréalais Karl R. Hearne (Touched) ne prétend pas révolutionner la formule, mais nous offre tout de même un sacré bon divertissement.
Rattrapée par le poids des années, qui va avec son lot d’ennuis – un corps vieillissant, un mari malade, une retraite difficile – Ann Hunter (Dale Dickey, True Blood) demeure malgré tout indépendante et fière. Le quotidien n’est pas simple, mais la grand-mère conserve une fougue et une énergie de jeunesse qui lui permettent une relation d’égale à égale avec sa petite-fille Emma (Romane Denis, Slaxx), qui l’appelle affectueusement « The G » (pour granny, ou grand-mère). Mais lorsque deux fiers-à-bras entrent dans le domicile de l’aînée, la forçant, elle et son mari, à entrer dans une maison de retraite contre leur gré, Ann se révèle être une force vengeresse, une femme qu’on ne veut pas brusquer.
L’idée du malheureux sort que la société réserve aux personnes âgées, souvent présentée au cinéma dans un contexte dramatique, est ici rendue à l’aide de codes liés au thriller et à l’horreur (et même, plus tard, d’action). L’établissement où est envoyé le couple est menaçant, et les personnages y arrivent avec confusion et inquiétude. Parfois, bien que très appuyées dans l’exécution, les situations sont tout de même trop proches du réel pour qu’on y reste insensible. Le sentiment d’abandon par la famille et la lente résignation ressentie par Ann, qui seront à la source de sa vengeance, sont efficaces et crédibles. The G réussit à avoir son propre ton et humour, n’alourdissant pas la situation pénible, bien au contraire. Le scénario manque parfois de subtilité, mais le contexte du film de vengeance appelle tout de même à une trame claire, sans confusion, et c’est ce qu’on nous offre.
Le personnage principal de la grand-mère, incarnée par une Dale Dickey au sommet de sa forme, est définitivement la force du film. L’actrice, qu’on a pu voir récemment dans la série Fallout, rend bien le personnage, désabusé et alcoolique, mais qui possède malgré tout cette force et résilience rafraîchissantes pour son casting. Derrière son jeu humoristique se cache une profonde rage qui, bien que peu novatrice dans sa présentation, est somme toute maîtrisée. Et c’est un réel plaisir que de suivre cette intrigue qui, tournée à Montréal avec un réalisateur et certains acteurs d’ici (en plus de Romane Denis dans un rôle principal, on reconnaîtra notamment Roc LaFortune et Joey Scarpellino), nous plonge dans un étrange sentiment de familiarité tout au long du récit.
C’est donc avec confiance qu’on se laisse guider dans ce fil narratif qu’on connaît déjà très bien. La vengeance d’Ann Hunter est divertissante, bien incarnée. En parallèle, on suivra également sa petite fille Emma qui, voyant bien les déboires que vit sa grand-mère, essaiera tant bien que mal de l’aider dans sa quête, tout en tentant de la convaincre que l’aînée n’a pas été abandonnée par sa famille. Mais autant l’arc narratif de la grand-mère est crédible dans le ton du film, autant celui de sa petite-fille est plus difficile à croire. La différence est simplement la force du personnage d’Ann Hunter, tellement bien écrite et incarnée qu’elle en éclipse tout le reste.
Finalement, The G est un bon revenge story qui ne se perd pas dans des complexités superflues, servi par une distribution impressionnante. Le film prend des directions assez connues, mais l’originalité de sa prémisse en fait une bonne proposition qui se démarque du lot. Et des personnages de grand-mère qui troquent la marchette pour un revolver, on en redemande.
Lisez également notre entrevue avec le réalisateur Karl Hearne et l’actrice Dale Dickey.
The G est présenté au Cineplex Forum et VIP de Montréal dès le 1er décembre.
Cette critique était initialement publiée le 27 juillet 2024 dans le cadre du festival Fantasia.
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