C’est la chaîne AMC qui s’est risquée à transposer Anne Rice au petit écran, et nous avions tous hâte de voir le résultat d’Interview with the Vampire puisqu’il s’agissait du premier saut dans l’univers de l’autrice, suite à leur acquisition des droits d’une grande partie de ses œuvres.
Renouant avec le journaliste Daniel Molloy, qui avait jadis couché sur papier ses confessions, Louis de Pointe du Lac, autrefois homme d’affaires aisé de La Nouvelle-Orléans qui s'était uni au vampire Lestat de Lioncourt avant que ce dernier ne fasse de lui l’un des siens, décide de corriger ses mémoires.
Depuis que le cinéaste Neil Jordan a majestueusement adapté le roman Interview with the Vampire avec le concours de sa romancière à la scénarisation, tous ses fidèles lecteurs rêvaient du jour où d’autres adaptations de cette envergure pourraient mettre en images les romans de Rice. Ce n’est pas ce nouvel essai qui va changer les choses.
On ne devrait peut-être pas en vouloir à cette série d’être dans les standards télévisuels. Il faut l’admettre, nous ne sommes pas devant un ratage complet. Plusieurs idées étranges avaient un certain potentiel, malgré leur discordance avec les écrits originaux; Louis étant un jeune homme gai, de race noire et dorénavant directeur de bordels au lieu d’un propriétaire de plantations. Même si les puristes de Rice avaient de quoi plisser les yeux, non pas par homophobie ou racisme, mais plutôt par incompréhension, certains thèmes de l’artiste demeuraient présents. C’est notamment le cas de l’importance du savoir, de la solitude et de la luxure.
Malheureusement, tout commence à s’effriter avant la fin du premier épisode, et la descente maintient sa course jusqu’à la toute fin. Le résultat devient un énième produit télévisuel où les créateurs semblent avoir en main la liste des ingrédients usuels à utiliser pour happer sur leur passage un maximum de téléspectateurs plus jeunes. Sans être de la très mauvaise télévision, l’ensemble reste quelconque et préfabriqué. Par ailleurs, on a cette impression que l’intrigue, partant dans tous les sens et générant un suspense défaillant, tombe dans ce qu’elle dénonce. C’est comme si à trop vouloir être inclusif, et en développant sans finesse la trame, le résultat encastrait les minorités dans ces rôles désuets que la société leur a établis.
Les chaînes payantes et certaines plateformes nous ont récemment proposé des séries si étoffées, que nous sommes peut-être simplement trop gâtés, mais il s’agit tout de même d’une adaptation d’un texte d’Anne Rice. Difficile d’accepter que les dialogues poétiques nous ayant enivrés à la lecture nous paraissent maintenant ternes et sans vie. Parce que, disons-le, Rice savait drôlement bien écrire. Elle était l’une des plus grandes autrices de son siècle, et peu d’écrivain.e.s en viendront à établir une prose aussi bien tissée.
Si l’acteur Jacob Anderson (Game of Thrones) manque parfois de nuance dans le rôle de Louis, Sam Reid (Belle) compose en revanche un Lestat assez solide. De son côté, la future vedette d’Avatar: The Way of Water, Bailey Bass, est trop agitée et agaçante en Claudia.
En résumé, le trio composé par Tom Cruise, Brad Pitt et Kirsten Dunst n’est pas prêt d’être oublié, alors que cette série, pourtant renouvelée pour une seconde saison, ne marquera aucunement l’imaginaire des téléspectateurs.
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