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[Critique] « Queen Rising » : souhaiter le meilleur, mais obtenir le pire

Avec Queen Rising, nous avons l’honneur, chez Horreur Québec, de couvrir un film étudiant pour la toute première fois! OK, c’est totalement faux, mais étant donné le niveau de maladresse et d’erreurs démontrées dans la réalisation de Princeton James, on serait en droit de présumer être devant le travail d’un élève de cinéma en début de parcours.

Madison, enseignante en difficulté financière, est approchée par un éditeur pour écrire un livre sur son expérience en tant que survivante d'une série de meurtres survenus lors de ses années universitaires. Elle y voit l'occasion de se refaire financièrement et de sauver sa maison, sur le point d'être saisie par la banque. Mais pour cela, elle devra se replonger dans son sombre passé qu'elle aurait préféré garder enfoui...

D’abord, il faut rendre à Princeton James ce qui est à Princeton James : la volonté de réaliser un film social dont l’équipe et la distribution sont presque entièrement composées de personnes noires. L’objectif étant d’élever leur voix et de valoriser leur talent. C’est donc un but très noble, mais qui va très rapidement se casser la gueule en cours de route. Nous y reviendrons plus tard.

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Avant de se lancer dans le cinéma, James était dramaturge, ayant écrit et mis en scène plusieurs œuvres théâtrales reçues plutôt positivement par la critique. Malheureusement, la scénarisation est très différente de la dramaturgie, et il en va de même pour la mise en scène. Les problèmes commencent là, avec un cinéaste qui n’utilise aucun des outils propres au cinéma pour raconter son histoire, chose qui se révélera être particulièrement néfaste plus tard. Dans Queen Rising, tout passe par les dialogues. Même les meurtres du tueur en série nous sont racontés plutôt que montrés. Le film est donc exempt de toute scène d’assassinat et c’est désespérant. Plus le récit avance, plus on languit de voir un brin de meurtre, une seule goutte de sang; même entendre un cri de terreur serait satisfaisant à ce stade. Hélas, cela n’arrive jamais. Que du dialogue, comme si nous étions devant une pièce de théâtre. Tiens, tiens…

Mais les problèmes d’écriture ne s’arrêtent pas là. Queen Rising est structuré en couches temporelles, c’est-à-dire que nous suivons trois époques distinctes de la vie de Madison : le présent, où elle raconte son histoire à un écrivain fantôme; ses années d’études, durant lesquelles la série de meurtres se produit; et son enfance, montrée de manière plus ou moins aléatoire. Nous avons donc des sauts répétés dans le temps, qui sont parfois même des flashbacks dans des flashbacks. Mais comme notre réalisateur refuse d’utiliser l’image comme vecteur narratif, rien ne différencie visuellement les différentes époques. On est donc constamment confus⸱e et en quête de repères temporels pour comprendre quand se déroule la scène que l’on regarde, ce qui est étonnamment compliqué puisque la même actrice interprète Madison dans deux des trois époques. C’est un véritable chaos, constitué de nœuds scénaristiques que nous devons démêler en portant des mitaines de four. Le tout distrait énormément de l’histoire et du mystère en son centre, à savoir l’identité du tueur en série.

Parlons-en du mystère. Comme on ne voit pas les meurtres, que se passe-t-il concrètement à l’écran? Nous suivons la vie amoureuse de Madison. Oui, vous avez bien lu. Dans le but de trouver l’amour sur le campus, Madison fréquente plusieurs hommes, qui seront tous plus ou moins abusifs envers elle et qui seront tués un à un hors champ par un personnage dont l’identité est tellement évidente que la dévoiler ne devrait même pas compter comme un divulgâcheur. Mais on se garde tout de même une petite gêne pour les deux personnes et demie qui décideront de se taper le film. Queen Rising possède d’ailleurs une ou deux autres révélations d’une stupidité légendaire et qui n’ont absolument aucun sens, que ce soit logiquement ou narrativement. Tout est extrêmement prévisible et cliché, au point où on ne mentionnera pas certains problèmes du scénario au risque de révéler accidentellement un « twist ».

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On en vient donc au dernier clou dans le cercueil de moins en moins métaphorique de ce film : les thématiques. Princeton James aborde ici très, très maladroitement les cycles d’abus et de violence. Madison, ayant eu un père agressif, se dirige vers des hommes du même type une fois adulte. Mais, l’écriture étant ce qu’elle est, le film finit par suggérer accidentellement que toutes les personnes noires sont dangereuses et violentes. On atteint un niveau de maladresse et d’incompétence tellement élevé qu’une œuvre écrite, réalisée et interprétée par des artistes noirs finit par être involontairement raciste! On va même jusqu’à nous dire, tout aussi accidentellement (du moins, on ose l’espérer), que les femmes victimes d’abus de la part des hommes sont des menteuses manipulatrices et opportunistes. Mon Dieu!

Voilà, il n’y a rien à sauver dans Queen Rising, à part peut-être le jeu des acteurs. La production a clairement de très bonnes intentions, mais chaque élément est si maladroitement exécuté qu’il produit l’effet inverse. Cependant, il s’agit d’un premier film de la part de gens qui ne sont pas cinéastes de profession, et ils ne peuvent que s’améliorer s’ils décident de continuer et c’est bien ce qu’on leur souhaite.

Queen Rising est disponible sur:
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Pour les fans...
de film qui aurait pu être un podcast sans que ça fasse de différence
de cinéma étudiant
de théâtre amateur
0.5
Note Horreur Québec

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