Dans un film d’horreur, le personnage noir meurt toujours en premier. C’est l’un des clichés les plus connus des slashers, perpétré depuis l’âge d’or du genre. Or, qu’arrive-t-il lors qu’un scénario typique de film d’horreur est porté par une distribution à 100% afro-américaine? C’est la prémisse qui annonce déjà le ton satirique et engagé de The Blackening, le nouveau film de Tim Story (que l’on connaît déjà pour ses classiques de l’horreur Fantastic 4 et Tom & Jerry).
C’est après avoir loué un chalet isolé pour célébrer leurs retrouvailles qu’une bande d’amis tombe sur un jeu de société profondément raciste et problématique, dans une pièce cachée au sous-sol. Une sorte de Jumanji où l’on doit répondre à des questions de plus en plus discriminatoires. À la moindre mauvaise réponse, les conséquences peuvent être mortelles. Bien vite, le groupe comprend qu’il est piégé dans un environnement hostile, traqué et espionné par une présence sinistre et malveillante qui veut sa mort.
Il est intéressant, en parcourant la filmographie de Tim Story, de constater qu’après avoir touché à plusieurs genres, notamment les films de super-héros ou ceux pour enfants, le réalisateur s’attaque à un film où la maîtrise de l’horreur est à la base même de la prémisse. Parce que pour se lancer dans un projet qui demande une réinvention des codes de l’horreur, il faut déjà les maîtriser. Et dès les premières minutes du film, on constatera bien vite les influences du réalisateur. La réflexivité des personnages de Scream, la menace d’une invasion à domicile d’un Halloween, la musique et la réutilisation des effets sonores bien connus de Friday the 13th; les codes les plus grossiers du slasher sont mis en place dès le départ afin de pouvoir les détourner. Et de manière générale, l’objectif est atteint, du moins en ce qui concerne le sujet principal du film.
The Blackening n’a aucune gêne à déclamer en grandes pompes ce à quoi il s’attaque. Les personnages, tous afro-américains, n’ont pas même le temps d’arriver au chalet qu’ils ont loué que déjà, un policier subtilement dénommé Sergent White les aborde sans raison afin de vérifier s’ils ont véritablement le droit d’être là. Déjà, l’environnement du film est menaçant pour les personnages, et les choses s’accéléreront lorsqu’après avoir bu quelques bières et consommé plusieurs drogues (permettant ainsi au scénario de passer par la phase classique où tous les personnages sont brièvement caractérisés avant qu’un tueur se pointe), le commentaire du film sur le racisme prendra de plus en plus d’importance.
Si, dans l’intrigue, la critique s’attarde à l’intolérance raciale, elle aborde également la problématique du racisme dans le cinéma slasher en lui-même. Parce qu’au final, tous ces clichés dont on rit depuis longtemps est quand même probant d’une injustice présente dans la majorité des scénarios classiques de ce type. Et c’est au travers de cette critique sociale et artistique que The Blackening est à son meilleur.
Malheureusement, une fois qu’on écarte ce commentaire engagé qui est au final la raison d’être de l’œuvre, le reste de l’intrigue et la maîtrise du genre se montrent un peu faibles. On se contentera de reprendre un style et un ton connus, juste assez pour bien situer les personnages dans le contexte familier d’un slasher, mais la réalisation ne prendra jamais de réels risques. Les revirements sont prévisibles, les scènes de meurtres manquent d’originalité (ce qui est tout de même un élément important du genre) et le film, de manière générale, n’offre pas vraiment de surprises. On en gardera tout de même une réflexion intéressante, amenée tout en humour (qui fonctionne bien la plupart du temps), dans un cadre méta qui aurait pu être encore mieux exploité.
Au final, The Blackening est une comédie d’horreur qui ne se démarque pas des autres au niveau de son intrigue ni de sa technique, mais davantage par l’originalité du point de vue qu’elle présente. Le film n’a rien de percutant, mais promet tout de même un bon moment et quelques sourires.
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