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[Critique] The Last of Us (2023): ou comment transposer un classique vidéoludique sans se planter

AVERTISSEMENT: après notre critique du tout premier épisode de la série The Last of Us, diffusée sur HBO/Crave, celle-ci porte sur l’intégralité de la première saison, composée de neuf épisodes et se terminant le 12 mars prochain. Ne vous inquiétez pas, pour les néophytes, on restera vague pour éviter de divulgâcher autant que possible.

Donc, vous avez déjà lu notre premier papier sur l’épisode 1? Sinon, réglez ça maintenant, car on ne vous fera pas un copier-coller, à part pour la prémisse:

Après qu’une pandémie ait décimé une large partie de la population, plusieurs communautés tentent de subsister dans un monde en désolation. Les survivants doivent trouver une solution, afin de tenter d’éradiquer la menace d’être infecté par ce terrible virus, qui transforme ses hôtes en machine à tuer. Les infectés l’ont été par un virus fongique, un champignon extrêmement virulent qui prend possession des humains, ces derniers devenant de dangereux cannibales.

Pari foutrement réussi

The Last of Us affiche série

Mais que s’est-il passé depuis qu’on a laissé Joel (Pedro Pascal), Ellie (Bella Ramsay) et Tess (Anna Torv), pendant que résonnait ce classique des années 1980 qu’est Never Let me Down Again de Depeche Mode? Premièrement, on a constaté que le consensus était globalement positif, même si certains fans du jeu sont certes pointilleux (pas grave). Après avoir eu le privilège de visionner la série dans son intégralité, on peut affirmer sans gêne qu’on a droit à une adaptation filmique foutrement réussie d’un jeu vidéo. Enfin!

De Super Mario Bros. à Mortal Kombat, en passant par House of the Dead… la liste de ratages est plutôt longue. Il y a bien eu quelques exceptions, comme le premier Silent Hill et, pour plusieurs, la première mouture de Resident Evil, qui connut un succès retentissant (en dépit d’avoir drastiquement changé le ton et le genre, en faveur de l’action).

Avec The Last of Us, de l’œuvre originale, on a su respecter et conserver — sur toute la durée — à la fois le ton, plusieurs moments et personnages forts, de même que son essence et ses intrinsèques thématiques, en proposant un récit inclusif, captivant et créatif, sans pour autant risquer de décevoir les admirateurs de la première heure. Un vrai tour de force. Si l’on a tenu à inclure plusieurs bonbons pour les fans, jamais on n’a oublié de raconter une vraie bonne histoire. Bravo à Craig Mazin (Chernobyl), c’était un défi assurément risqué à relever.

Fans de The Walking Dead, votre tête va exploser

Dès le deuxième épisode (réalisé par Neil Druckmann, créateur de la franchise et co-président de Naughty Dog), on nous offre plus de contexte sur les origines de l’impitoyable pandémie, dans une scène percutante de réalisme se déroulant en Indonésie. On suppose que Mazin n’y est pas pour rien et qu’il est possiblement derrière les subséquentes scènes qui référencent certains des moments les plus noirs de notre histoire.

Un habile jeu d’ellipses et de retours en arrière dynamise le tout, afin de nous offrir des moments de répit remplis de lumière et parfois même, de douceur. Comme l’épisode suivant, lors duquel on se surprend à penser à Six Feet Under (oui, aussi sensible et poignant). Chapeau à Linda Ronstadt, mais surtout à Nick Offerman (Parks and Recreation, Pam and Tommy) et Murray Bartlett (White Lotus) pour ce beau moment d’accalmie.

Comme chez The Walking Dead, on est dans le brutal et le tragique au niveau des twists, alors que, la plupart du temps, ce sont des humains qu’on doit se méfier, même si les infectés sont assez voraces merci. Or, sachez que si vous aimiez les performances de la distribution de la susmentionnée série d’AMC, vous allez assurément militer pour qu’on donne à Pascal et Ramsay des Emmys. Oh que oui, on est vraiment une grosse coche au-dessus ici.

The Last of Us saison 1 image

Que des performances de course

Quand on y pense comme il faut, c’est comme si Pascal reprenait le même genre de quête que son bien-aimé Mando (accompagner et protéger une personne très spéciale), quoique que son Joel est un homme brisé et aigri, avec un solide PTSD, évoluant dans un univers aussi réaliste que post-apo. Et que cette frondeuse d’Ellie n’a trop pas la langue dans sa poche.

Comme dans le jeu, nos protagonistes marchent beaucoup (c’est une road série), se promenant en mode exploration ou contemplation, le tout ponctué de belles conversations entre Ellie et Joel, faisant évoluer leur relation de belle façon. Les dialogues font mouche et comme on l’espère, la chimie opère.

Impeccable est l’ensemble de la distribution qui inclut aussi Melanie Lynskey (Heavenly Creatures, Yellowjackets, Castle Rock), le vétéran Graham Greene (The Green Mile) et, dans le rôle de Riley, Storm Reid (The Suicide Squad, The Invisible Man). Les fans se réjouiront de savoir que ces mutants qu’on surnomme clickers sont aussi épileptiques et terrifiants que dans le jeu (doublés par les mêmes acteurs vocaux en plus!) et tout aussi aveugles (mais pas du tout sourds) que les créatures de A Quiet Place. Sachez qu’on est loin du licker des derniers Resident Evil.

The Last of Us image saison 1

Haut potentiel de série culte

Visuellement, la palette chromatique du jeu est respectée, aussi désaturée que délavée. C’est toujours assez surréaliste de voir l’urbain en mode décrépit, envahi de végétation. Dans The Last of Us, l’horreur flirte souvent avec le drame, et parfois même avec le western. Entre deux fusillades ou embuscades, on y croise de très beaux bestiaux (aux fans de deviner), des lieux impressionnants (i.e. musée moisi, villages fortifiés, forêts parfois enneigées) et quelques communautés guidées par des leaders forts singuliers.

Au niveau réalisation, on est souvent en mode naturaliste (caméra nerveuse et lumière souvent très belle), le tout restant très cinématographique et globalement plutôt consistant. Après Mazin et Druckmann, se succède un ensemble de talents ayant fait leurs preuves principalement au petit écran. On retrouve Peter Hoar et Jeremy Webb (qui ont tous deux bossé sur les séries Altered Carbon, The Umbrella Academy et Dr.Who, notamment), Ali Abbasi (Shelley), de même que les réalisatrices Jasmila Zbanic (Sarajevo, mon amour) et Liza Johnson (What We Do in the Shadows).

On dénotera aussi quelques références geek, qu’on parle de bédés ou de classiques vidéoludiques, ou encore ces subtiles révérences à des grands du septième art (comme Joe Dante, George Romero ou Martin Scorsese). Les mélomanes seront gâtés et se régaleront en reconnaissant des chansons d’hier (saurez-vous reconnaitre celle de The Cure sur le carrousel?) et ce caméo d’un pièce marquante tirée de The Last of Us 2. Parlant de musique, au design sonore anxiogène, se collent à merveille les fort belles mélodies mélancoliques et post-mariachi de Gustavo Santaolalla.

Bien qu’on se serait probablement passé de cette scène nous présentant la maman d’Ellie (il faut bien essayer de lui trouver un défaut à cette excellente série, hein?), c’est avec un petit spleen tout gris qu’on quitte The Last of Us, après une finale laissée évidemment grande ouverte. C’est qu’il y a plusieurs pistes narratives à explorer dans le futur. Il faut savoir qu’il existe non seulement un prologue (la minisérie de bédé American Dreams) et un épilogue (l’expansion Left Behind) au premier jeu, mais aussi un deuxième opus, le tout aussi excellent (sinon meilleur) The Last of Us Part II, sorti en 2020. On ne serait pas surpris d’apprendre sous peu que la deuxième saison est déjà en chantier. On se croise les doigts, comme on est déjà foutrement excités rien que d’y penser.

Note des lecteurs1 Note
Points forts
Le scénario et la réalisation, parfaitement dans le ton.
La direction photo, aussi décrépite que magnifique.
Et le jeu très juste du binôme Pascal/Ramsay.
Points faibles
En cherchant des poux, on dirait la susmentionnée scène avec la maman d’Ellie, qui semble un peu précipitée, comme si on s’était senti obligé de l’inclure, pour au final être oubliable.
4.5
Note Horreur Québec

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