The Medium, chaudement débarqué en exclusivité chez Shudder, c’est la rencontre improbable entre deux noms marquants du cinéma de genre asiatique. Il s’agit avant tout d’un retour à l’horreur pour le thaïlandais Banjong Pisanthanakun, qui s’est imposé au début des années 2000 avec des films comme Shutter, Alone et l’anthologie 4bia.
Pisanthanakum, qui réalise The Medium, n’arrive toutefois pas seul: il co-écrit ce nouveau film avec Na Hong-jin, cinéaste coréen responsable de l’immense The Wailing. Hong-jin agit également comme producteur exécutif et l’on reconnait ici tant son style que sa tendance à l’intrigue mastodonte de plus de deux heures. Plus de deux heures… de faux documentaire, dans le cas qui nous intéresse aujourd’hui.
L’histoire nous entraîne au coeur des pratiques chamaniques thaïlandaises. Une équipe de documentaristes filme le quotidien de Nim, qui agit comme chaman et relai de la divinité Ba Yan pour sa communauté. Nim devra toutefois faire face à une menace hautement personnelle lorsque Mink, sa nièce, montre des signes de possession. Alors que Nim blâme d’abord la foi chrétienne de sa soeur Noi et son rejet de Ba Yan, est-ce vraiment la cause du mal qui afflige sa famille?
Pisanthanakun possède un style rappelant beaucoup celui de James Wan, balançant jump scare par dessus jump scare à une audience qui peine à reprendre son souffle. C’est un entertainer dans l’âme. Hong-jin est tout son contraire: d’une noirceur absolue, il pose ses intrigues avec patience avant d’en refermer l’étau autour du spectateur.
Les cinéastes trouvent tout de même une forme d’équilibre entre leurs approches. L’importante durée permet au scénario d’explorer un univers de faux semblants typique à Na Hong-jin, offrant beaucoup de nuance aux différents protagonistes. Alors que le film de possession régresse souvent à un niveau série B sans ambition narrative qui cite les money shots de Friedkin, The Medium suit son propre chemin avec sa sombre histoire de famille s’inscrivant à la frontière entre tradition animiste et modernité. L’esthétique du faux documentaire rencontre ici celle du réalisme magique thai et il en résulte des moments d’une beauté plastique surprenante. L’emploi d’un casting non-initié (c’est pour la plupart leur premier tour de piste au cinéma) contribue à l’ambiance.
Bien sûr, Pisanthanakun n’est pas en reste. Fidèle à son habitude, il nous bombarde de scènes à frissons. The Medium embrasse les excès du film de possession, y allant d’un crescendo qui débute sur les comportements de plus en plus erratiques de son personnage possédé avant de déchaîner sur nous une horreur grotesque. On sent l’influence du cinéma étasunien, tout particulièrement de la vague du found footage qui faisait rage il y a une dizaine d’années. La mise en scène est d’ailleurs un espèce de pot-pourri des moments marquants du sous-genre, livré par un cinéaste qui épuise tous les trucs qu’il a dans son sac pour terrifier son public.
La dualité existant au sein de The Medium, longuement décrite ci-haut, risque toutefois de recevoir des réactions très variables. La deuxième partie du film manque peut-être de concision, notamment lors d’un segment de surveillance nocturne qui s’étire un peu. Pour les spectateurs plus pointilleux sur l’écriture de la caméra intradiégétique, The Medium ne passera pas toujours le test. Même en ayant plusieurs caméramans, donc une multitude d’angles de vue sur chaque scène, le film titille parfois la suspension d’incrédulité: comment ont-ils obtenu CE PLAN? Les cinéastes misent sur une esthétique peaufinée plutôt que brute, adjoignant même une trame sonore à leurs images.
Dans un mois marqué par le retour des franchises V/H/S et Paranormal Activity, The Medium parvient à s’imposer comme le faux documentaire à ne pas manquer. Pour l’auteur de ces lignes, c’est même le film le plus effrayant de l’année. Rassemblez vos ami.e.s, éteignez les lumières et préparez-vous à quelques sueurs froides d’octobre.
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