Comme Satan’s Slaves avant lui, The Queen of Black Magic (Ratu Ilmu Hitam) est le remake d’un film d’horreur indonésien paru à l’aube des années 80. Cette nouvelle mouture raconte l’histoire d’un groupe d’adultes ayant en commun leur jeunesse passée dans le même orphelinat rural. Ils y retournent aujourd’hui pour rendre hommage à son ancien directeur, M. Bandi, qui est mourant. Sur place, des événements surnaturels (très) sanglants les forceront à faire face à un passé qu’ils avaient choisi d’occulter.
Au-delà de la violence graphique servant d’argument de vente chez nous, regarder un film d’épouvante indonésien, c’est s’immerger dans une culture de cinéma de genre qui se situe très loin du cynisme ambiant de spectateurs nord-américains ayant déjà tout vu. Les films de Joko Anwar, par exemple, ont une espèce de naïveté charmante dans leur maniement très solennel des clichés du genre… ainsi que leur représentation de malédictions folkloriques locales s’abattant sur des personnages qui n’ont aucune peine à accepter le surnaturel existant autour d’eux.
Anwar, que l’on retrouve ici comme scénariste, parvient à nous faire connecter à son univers filmique par sa sincérité débordante. Ce n’est pas le cas de Kimo Stamboel, le réalisateur de The Queen of Black Magic. En fait, il est difficile de s’intéresser du début à la fin au film qu’il nous propose ici.
Comme Dreadout du même cinéaste, Queen souffre du syndrome Friday the 13th: le film peine à caractériser ses trop nombreux personnages et à leur donner une véritable fonction narrative hormis celle de mourir. Les comédien.nes, dont plusieurs que l’on a déjà croisé ailleurs dans cette nouvelle vague de cinéma de genre indonésien, se démènent comme ils peuvent avec ce qu’ils ont.
Il y a bien quelques moments touchants, où l’on sent la violence de leur passé bouillir sous la façade des protagonistes. Mais après qu’une première série de personnages aient rencontré leur sombre destin et que l’on en soit toujours au point de démêler qui est qui dans cette histoire, on commence à réaliser qu’il faudrait peut-être regarder le film avec un organigramme.
Une fois passée l’introduction qui s’égare entre tout ce beau monde, Stamboel cherche sans beaucoup de succès à construire une atmosphère tendue. Il faut le dire, Queen compte deux ou trois scènes d’épouvante très efficaces, dignes du meilleur de ce que Joko Anwar ou James Wan savent nous offrir. Un moment inspiré de Ringu est glaçant et un autre se déroulant dans un autobus tient du génie. Toutefois, contrairement aux films réalisés par Anwar, qui présentent des qualités techniques remarquables, le reste de The Queen of Black Magic se déroule dans une maison à la topographie incompréhensible et dont le décor est très peu exploité. La même photographie parcheminée uniformise la majorité des scènes.
Dans l’ensemble, le film mise avant tout sur le facteur révulsion. Stamboel aligne une impressionnante quantité d’effets gore, ce qui devrait lui gagner les faveurs d’un certain public. Le passé enfoui de nos protagonistes se matérialise sous la forme d’un purgatoire infernal, mais les personnages brossés à gros traits empêchent l’horreur de la situation de nous heurter de plein fouet. Une femme souffrant de troubles alimentaires est poussée à se mutiler atrocement. Une autre, germophobe, est poussée à se mutiler atrocement. Vous voyez le tableau.
Kimo Stamboel a longtemps été la deuxième moitié d’un duo qu’il formait avec le cinéaste Timo Tjahjanto, aujourd’hui bien connu à l’international par les amateurs de cinéma de genre. Maintenant qu’il vogue en solo, Kimo peine malheureusement à prouver qu’il soit lui aussi un cinéaste de premier plan.
The Queen of Black Magic est disponible en exclusivité chez Shudder Canada.
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