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[Critique] « The Watchers » : effectivement, les guetteurs guettent, mais ne font pas grand-chose d’autre

Il y a une certaine poésie dans le choix qu’a fait Ishana Night Shyamalan d’adapter The Watchers (Les Guetteurs) au cinéma. En effet, la réalisatrice, dont c’est le premier long métrage, transpose à l’écran le tout premier roman de l’auteur irlandais A.M. Shine. Mais si le livre en question fut acclamé autant par la critique que le public, le destin de son adaptation reste encore à déterminer.

Lorsque Mina se perd dans une forêt sombre pendant un voyage en voiture, elle est accueillie par un étrange groupe de personnes qui lui donne une liste de règles à suivre pour survivre aux dangereuses créatures qui les observent une fois la nuit tombée. Mais certaines règles sont faites pour être brisées...
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Il est toujours fascinant de découvrir les premiers films de cinéastes. C’est avec ces œuvres que naissent le style et les obsessions thématiques de leurs créateurs, qui vont souvent en faire trop et tout lancer sur le mur pour voir ce qui s’y colle. Mais pas Ishana Night Shyamalan. Celle-ci démontre une retenue étonnante avec son thriller fantastique à la mise en scène sobre, mais efficace (hormis sa pénible scène d’ouverture). La priorité de la réalisatrice est ici la construction d’une atmosphère inquiétante, et c’est plutôt réussi.

The Watchers prend son temps pour installer le lieu dans lequel nous passerons l’essentiel du temps, à savoir l’une des forêts les plus sinistres récemment présentées dans une production horrifique. L’endroit est le point fort du film et, bien que ce soit cliché, on peut le considérer comme le cinquième protagoniste du récit. L’effet fonctionne grâce à la mise en scène de la cinéaste, qui fait languir sa caméra pendant de longues minutes sur les arbres tortueux et labyrinthiques servant de prison au groupe de personnages. Le film s’amuse d’ailleurs à dissimuler certaines de ses créatures en arrière-plan, tout juste hors focus, pour attirer notre regard vers elles lors d’un éventuel mouvement de feuillage. Cela est particulièrement efficace et donne l’impression d’être constamment observé par quelque chose au loin.

Outre son atmosphère, la tension du récit réside dans deux questions simples : quelle est la véritable nature des guetteurs et que veulent-ils? Les personnages passeront donc leur temps à tenter de trouver des réponses en enquêtant et, inévitablement, en brisant les règles. Il s’agit effectivement d’une question intrigante qui parvient presque entièrement à soutenir le film. Pourquoi presque? Premièrement, parce que quelqu’un, quelque part, n’avait pas assez confiance en ce mystère pour le laisser porter l’histoire. De nombreux et inutiles jump scares viennent s’insérer dans le film, que ce soit sous forme d’un animal surgissant de nulle part ou d’une attaque soudaine d’un des guetteurs. Le résultat est très superficiel et donne l’impression de vouloir réveiller le public avec un bruit soudain plutôt que de laisser le malaise s’étirer. Deuxièmement, les personnages. Malgré de très solides performances de la part de Dakota Fanning (Ripley), Georgina Campbell (Barbarian) et Olwen Fouéré (Mandy), les personnages, sans être des coquilles vides, sont beaucoup trop lisses et leurs interactions sont peu intéressantes. On nous dit, par exemple, que l’un d’eux vit très mal l’isolement de la forêt et qu’il commence à perdre les pédales. Déjà, on nous le mentionne à la place de nous le montrer et l’événement arrive beaucoup trop soudainement pour construire quoi que ce soit d’inquiétant sur le long terme.

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De plus, la tension de The Watchers est continuellement brisée par de trop longues et trop nombreuses scènes dans lesquelles les personnages interrompent le récit pour expliquer des éléments narratifs dans leurs moindres détails. Ces dialogues sont particulièrement mal placés et surviennent régulièrement. Même lors d’une scène où les protagonistes sont poursuivis par des monstres, ils prendront le temps de se poser dans un coin afin d’expliquer des choses, tuant ainsi toute forme de tension que le film tente de créer. Le problème vient clairement de l’adaptation. Ces informations doivent être livrées au public d’une façon ou d’une autre, mais dans un livre, on a beaucoup plus de temps pour correctement et naturellement placer ces informations alors qu’au cinéma, on a rarement plus de deux heures pour le faire. C’est où le manque d’expérience de la réalisatrice montre le bout de son nez. Des cinéastes plus habiles révéleraient ces informations visuellement à travers l’action et la mise en scène, non en la brisant sans arrêt.

Dans un film comme celui-ci, il est important que la menace soit claire et qu’on la ressente bien, mais ici, ce n’est pas le cas. En fait, on passe tellement de temps à faire autre chose (comme constamment tout expliquer), que cette épée de Damoclès qu’on devrait sentir flotter au-dessus des protagonistes tout au long de l’histoire est facilement oubliée jusqu’à ce que les monstres soient à nouveau dans le cœur de l’action.

Le scénario est aussi rempli d’incohérences narratives et de moments totalement dénués de logique. Ces erreurs se multiplient sans arrêt, perçant des trous de plus en plus gros dans le récit. Notre volonté à croire aux événements se déroulant à l’écran se voit alors progressivement endommagée et les grosses révélations faites en fin de parcours perdent quasiment tout leur impact. Puis, pour ajouter aux problèmes structurels et rythmiques, on a droit à un troisième acte beaucoup trop long et qui semble totalement superflu. C’est là où le public commence à regarder sa montre et à se dire que le générique aurait dû commencer bien plus tôt.

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Ceci dit, The Watchers se rattrape avec des thématiques bien pensées. Très rapidement, on dresse un parallèle entre les personnages enfermés dans leur petite maison et des animaux en cage. Tout comme eux, les protagonistes sont coincés derrière une vitre et sont observés de l’extérieur par des êtres imprévisibles aux intentions nébuleuses. Le film parle donc du traitement fait aux animaux et, bien qu’on ait rapidement fait le tour de la métaphore, elle reste intéressante et ajoute à la densité de l’œuvre.

The Watchers contient donc beaucoup de qualités et beaucoup de défauts, mais reste un divertissement sympathique et prometteur pour la suite de la carrière d’Ishana Night Shyamalan. Sans vouloir faire de mauvais jeux de mots, nous guetterons l’arrivée de son prochain film avec beaucoup d’enthousiasme.

Note des lecteurs2 Notes
Pour les fans...
de forêts sombres et mystérieuses
d'ambiance oppressante
des droits des animaux
2.5
Note Horreur Québec

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