Production la plus rentable au box-office à Taïwan cette année et film d’horreur taïwanais original le plus profitable de tous les temps, la sensation Incantation débarque chez Netflix ce mois-ci avec ses caméras à l’épaule et ses jump scares démoniaques. Traité à la manière d’un témoignage vidéo et inspiré d’un fait vécu (la fille aînée d’une famille affirmant être possédée par des démons est décédée de maltraitance à Kaohsiung en 2005), tous les ingrédients sont rassemblés pour un tour de manège féroce.
On suit à l'écran Li Ronan, qui nous supplie de prier pour sa fille Dodo, victime d'une terrible malédiction. C'est que 6 ans plus tôt, Ronan, son amoureux et le cousin de ce dernier ont brisé un tabou religieux en documentant un rituel ésotérique pour leur chaîne YouTube de chasseurs de fantômes. Les événements ont laissé la femme dans un terrible état, la forçant à donner sa fille dont elle était alors enceinte en adoption. Maintenant qu'elle va mieux, elle reprend la garde de Dodo, mais les choses ne tournent pas rond.
Le format d’Incantation est plutôt parfait pour les plateformes numériques. Les cinq premières minutes sont tellement bourrées d’images chocs et mystérieuses qu’il devient impossible de simplement passer à un autre titre. C’est également le cas pour la durée complète du film, qui nous bombarde de scènes de hantise et de gore (trypophobes, attention!) pendant presque deux heures. Les friands de vidéos de fantômes sur YouTube et TikTok seront aux anges, alors que le film s’inspire de certains de ces contenus les plus viraux pour créer ses scènes de terreur, souvent très efficaces — même si parfois peu utiles à l’intrigue. Le métrage de Kevin Ko s’amuse également à parler directement au spectateur en le questionnant et lui faisant mémoriser d’étranges symboles et incantations. L’immersion est donc plutôt réussie alors qu’en plus des images captées via cellulaires et caméras amateurs, l’horreur devient soudainement un peu plus tangible.
Le format est peut-être parfait, mais pas sans faille. En alternant en parallèle ces deux lignes de temps entre le passé et le présent, un peu à la manière de Ju-On, le montage donne parfois l’impression d’avoir coupé les coins ronds pour maintenir son rythme endiablé. Il nous manque donc parfois certains morceaux pour saisir ce qui se déroule, notamment sur les lieux de la communauté religieuse où les membres et leurs rituels auraient pu être mieux développés.
N’empêche, malgré une facture conventionnelle, il est rafraîchissant de se retrouver face à un found footage qui tente d’aller un peu plus loin, en abordant par exemple certains thèmes en lien avec les anxiétés de la maternité. L’actrice Hsuan-yen Tsai transmet bien le désarroi de son personnage, qui doit maintenant connecter et apprendre à vivre avec une enfant qu’elle apprend à connaître. Cette malédiction, c’est aussi celle d’avoir peur de «ne pas être une bonne mère».
Avec ses scènes horrifiques en série qui laissent très peu de répit et sa finale résolument malsaine, Incantation s’inscrit automatiquement dans la liste des found footage à voir du cinéma d’horreur. Et si Netflix n’a pas toujours l’oeil aussi aiguisé pour nous dénicher des découvertes au sein du genre, on peut cette fois le remercier pour cette dernière.
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