L’idée de réunir de nombreux artisans du milieu de l’horreur afin de discuter de cet univers fascinant est absolument réjouissante, et c’est exactement ce que propose Eli Roth sur la chaîne américaine AMC. En tout, sept épisodes abordant un thème spécifique — les zombies, le slasher (en deux parties), les créatures meurtrières, les possessions démoniaques, les vampires et les histoires de fantômes — étaient présentés lors du Fearfest de la chaîne; une série parfaite pour renouer avec les classiques du genre. Pour notre plus grand plaisir, plusieurs personnalités participent à Eli Roth’s History of Horror dont Stephen King, John Landis, Jamie Lee Curtis, Rob Zombie, Robert Englund, Joe Dante, Dee Wallace et bien d’autres.
Malgré l’idée des plus prometteuses, d’importants défauts risqueront d’irriter le spectateur pendant le visionnement de cette série documentaire. Entre autres bévues, la plus impardonnable est d’avoir parsemé les épisodes de nombreux spoilers révélant des événements clés de certains films tels que The Shape of Water, The Changeling et, surtout, Get Out. L’intrigue de ce dernier est complètement dévoilée par les intervenants; un choix douteux et scandaleux! Gâcher de belles surprises aux amateurs de l’horreur en tenant pour acquis qu’ils ont déjà tout vu les films dont il est question est tout simplement stupide et irresponsable. Vous êtes donc avertis (ce que le présentateur aurait dû faire en guise de préambule), si vous n’avez pas vu l’un des titres présentés lors de l’introduction de l’épisode en cours, fuyez!
Une réflexion s’impose donc en regardant History of Horror: qui est le public cible? Doit-on considérer l’ensemble comme une initiation au genre? Peut-être bien, mais les divulgâcheurs auront tôt fait de dissuader les néophytes de découvrir les grands classiques. Mais qu’en est-il des fans de films d’horreur? Ces derniers resteront définitivement sur leur faim, car les participants ne poussent jamais très loin leur analyse. Cela pourrait être expliqué par la contrainte de temps puisque les quarante-cinq minutes des épisodes ne suffisent pas à accommoder le trop grand nombre d’invités. On aurait pu céder leur place à des experts pour nous exposer les impacts des différents sous-genres plutôt que de se concentrer sur des acteurs qui nous offrent leurs opinions. Par exemple, en présentant The Howling, un intervenant mentionne que l’oeuvre offre une satire du mouvement Self-Help, un courant de pensée dominant des années 70, surtout en Californie. À aucun moment n’explique-t-on ce mouvement, ni la manière dont il est abordé dans le film de Joe Dante. C’est malheureusement une occasion ratée d’approfondir le sujet et de souligner les critiques sociales dépeintes par le cinéma d’horreur.
De plus, l’épisode traitant des zombies débute avec la série phare de AMC, The Walking Dead. Étant donné que le documentaire est diffusé sur cette même chaîne, plusieurs minutes lui sont consacrées et on a ainsi l’impression d’assister à une grossière info-publicité qui essaie tant bien que mal de faire mousser l’intérêt des spectateurs qui délaissent de plus en plus l’émission. Fort heureusement, quelques analyses rappellent l’impact de certains classiques lors de ce même épisode. Il est effectivement impossible d’aborder le sujet des morts-vivants sans mentionner le père des zombies modernes, le regretté George A. Romero, et l’épisode est une belle occasion de se remémorer l’importance de son premier film Night of the Living Dead, autant d’un point de vue cinématographique que social. Le seul fait d’octroyer le rôle principal à un acteur afro-américain tout en déclarant qu’il était tout simplement le plus talentueux lors des auditions était, en 1968, audacieux et s’avère une critique irrévérencieuse du climat de la société américaine de l’époque.
Malgré tous les irritants préalablement mentionnés, la série demeure tout de même divertissante grâce à son montage serré et aux nombreux extraits présentés. Mais est-ce assez pour investir sept heures de votre temps? La réponse est négative. Les propos ne sont jamais approfondis, mais plutôt anecdotiques. Eli Roth semble s’être payé un beau trip en oubliant le plus important, son auditoire.
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