Avec son plus récent Vivarium, nominé pour Le Grand prix de la Semaine de la Critique lors de son passage au festival de Cannes, le cinéaste irlandais Lorcan Finnegan jette un regard sombre sur la vie de banlieue. C’est devant une salle comble qu’il venait présenter le film en première nord-américaine au public de Fantasia le week-end dernier dans le cadre de sa toute première visite en Amérique.
Horreur Québec a profité de l’occasion pour discuter avec lui:
Horreur Québec: Connaissais-tu Fantasia avant de venir présenter Vivarium ici?
Lorcan Finnegan: Oui! Vivarium a débuté en tant que projet Frontières. Je ne suis jamais venu ici, c’est vraiment cool d’être à Montréal pour la première fois. Le festival est génial. Les employés sont vraiment gentils! [rire en regardant la relationniste présente lors de l’entrevue] J’aime quand les festivals de films sont comme une communauté, que tout est centralisé, que tout le monde sort au même bar après le soir, etc.
HQ: Vivarium est tellement différent de ton premier film Without Name. Celui-ci traite de la banlieue, tandis que le précédent représentait un retour vers la nature. Crois-tu qu’il y a une connexion entre les deux?
LF: Oui! Le premier explore des thèmes sur la nature et le deuxième un «manque» de nature. Il y a également un court-métrage entre les deux, Foxes, qui se trouve à présenter la nature qui réclame un endroit laissé abandonné. Pour moi ce sont des thèmes et des idées très similaires.
HQ: Comment Imogen Poots et Jesse Eisenberg se sont retrouvés impliqués dans Vivarium? Ils se retrouvent également à la production du film.
LF: Oui. Tu sais, parfois les acteurs obtiennent un crédit de production lorsqu’ils partagent une portion de leurs revenus. Le film était déjà entièrement financé. Imogen est arrivée dans le projet en premier. Je l’ai rencontrée à Londres et nous avons parlé de films. Elle avait déjà lu le scénario et l’avait aimé. Les acteurs aiment rencontrer les réalisateurs avant juste pour s’assurer qu’on n’est pas trop bizarres [rires]. On s’est très bien entendus, elle a donc accepté le projet.
Quand on s’est rencontrés à nouveau pour discuter de qui jouerait le rôle de Tom, son copain dans le film, elle a suggéré Jesse. J’ai tout de suite pensé que ça pourrait être intéressant. J’essayais de trouver un homme pas trop musclé ou imposant, comme on retrouve à Hollywood. On avait toutefois besoin de quelqu’un de très connu pour le financement. L’idée était parfaite, mais je ne pensais pas qu’il allait accepter. Apparemment, Imogen connaît Jesse depuis des années, et elle croyait vraiment que ça l’intéresserait. Elle lui a envoyé le scénario et deux jours plus tard, il nous appelait pour nous dire qu’il l’avait aimé.
HQ: Tout le monde mentionne le sous-texte de la banlieue, mais l’un des commentaires importants du film se situe également au niveau de couple traditionnel. Es-tu si pessimiste sur le sujet?
LF: (Rires) Non, non! Le but était davantage d’amplifier certains aspects de la vie courante, pour montrer à quel point ils sont étranges. C’est comme si on avait un certain ensemble d’objectifs de prédéterminés. L’un d’entre eux est d’acheter une maison. Puis ensuite on doit prendre une hypothèque, puis passer sa vie à travailler pour rembourser cette hypothèque juste à temps avant de mourir. Je voulais montrer ce «contrat social» d’une manière extrême pour souligner à quel point c’est étrange comme comportement. Je ne dis pas que c’est mal et qu’on devrait ne pas le faire, je dis juste qu’il y a autre chose de possible que ce conte de fées qu’on nous vend.
HQ: Il faut qu’on parle de ce moment dans le dénouement du film qui devient chargé en effets spéciaux vraiment cool. Quel était ton plus gros défi en tournant ces scènes?
LF: Ceux-là n’étaient pas les plus difficiles honnêtement! Les scènes où ils essaient de sortir du complexe immobilier étaient les plus complexes. Les maisons étaient construites à l’intérieur d’un entrepôt. Il n’y en avait que trois. Il fallait donc réussir à donner l’impression qu’ils conduisaient dans ces rues et toutes ces sections du complexe. On devait mélanger les vraies prises avec le CGI, les rendus 2D, les prises sur le plateau en Belgique et les prises à l’extérieur en Irlande, etc. C’était nécessaire, mais créer une cohésion avec tout ça était un grand défi.
HQ: Après deux films, comptes-tu dédier ta carrière au cinéma de genre?
LF: Pas nécessairement en horreur. Le prochain film que je compte faire est un thriller surnaturel et je travaille sur un autre qui est davantage comme un conte de fées dystopique. Mais oui, effectivement, ils seront définitivement très étranges. [rires]
HQ: Tu pourras venir les présenter à Fantasia…
LF: J’y compte bien!
[NDLR: Les prochaines questions contiennent des divulgâcheurs. Nous vous conseillons de les éviter si vous n’avez toujours pas vu le film!]
HQ: J’ai entendu plusieurs théories concernant le coucou du début du film. Quelles sont les tiennes?
LF: C’est un parasite. L’agent d’immeuble est comme un parasite et le son que le garçon et lui font est en fait celui d’une pie. Dans les scénarios, on les appelait littéralement les «gens pies» ou les «gens coucous». Il y a plusieurs rapprochements à faire avec ces oiseaux: les vêtements du garçon sont noirs et blancs, en plus des images à la télé — les pies sont noires et blanches, volent des choses et font ce son insupportable.
Je préfère que les gens se fassent leur propre interprétation de la chose toutefois, mais pour moi, ils sont comme ces oiseaux-parasites. Ils existent dans une relation symbiotique avec les humains. Ils ont un cycle de vie très étrange. Ils séquestrent des gens pour incuber leurs progénitures, qu’ils ne sont pas capables d’élever. Durant cette période les jeunes apprennent en imitant les humains et ils pourront ensuite trouver un autre couple pour élever le prochain. Ils ne sont pas méchants, ce sont seulement ce qu’ils font. Je trouve ça encore plus effrayant!
HQ: Que crois-tu qu’il se serait produit s’ils avaient accepté d’élever l’enfant?
LF: La même chose se serait produite. Je ne crois pas que ça aurait fait la moindre différence. Même s’ils avaient serré l’enfant dans leurs bras tous les matins, ce dernier aurait peut-être été plus gentil en imitant leurs gestes, mais leur destin aurait été exactement le même.
HQ: Aurait-ils pu, par exemple, lui apprendre à ne pas crier?
LF: Non plus. C’est dans sa nature! C’est un peu comme si tu avais chez toi un canard et que tu n’aimais pas qu’il cancane, tu préférerais qu’il jappe plutôt… Il va toujours cancaner! [rires]
Vivarium sera distribué prochainement au Québec par l’entremise de Métropole Films. On surveille l’annonce de sa date de sortie de près et espère grandement que Lorcan Finnegan viendra présenter ses futurs projets à Fantasia!
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