Troma. Synonyme de The Toxic Avenger pour plusieurs, la firme indépendante basée à New York existe depuis 1974 est connue pour ses séries B fauchées se vautrant dans un humour aussi niais qu’en bas de la ceinture, où règnent sexe et violence de façon tout à fait gratuite, mais ô combien assumée. #ShakespearesShitstorm n’y échappe évidemment pas et c’est très bien comme ça. Tenter de décrire la prémisse de la dernière réalisation de Lloyd Kaufman, grand gourou de la compagnie, d’une conventionnelle manière serait comme essayer faire la critique de GWAR lors d’un de leurs patibulaires et salissants concerts. Faut le voir pour le croire, comme disait jadis l’ortho à Yannick Marjot.
Si on n’avait que quatre mots, ce serait scato, lolos, (h)émo et barjo. Sinon, au lieu de remâcher le petit résumé du site de Fantasia, on ira plutôt avec une énumération de mots clés: savant fou (nommé Prospero), prostituées espionnes pas trop habillées, marionnettes en chaleur, influenceurs millénariaux effarouchés, baleines chieuses (tout en écorchant gaiement Sharknado et même Titanic au passage), handicaps et mutations de toutes sortes (vous ne croirez pas à ça!), orgies improbables, verdâtre narcotique (pire que le nuke de RoboCop 2) et ce fameux accident de char (oui, celui que vous avez déjà vu dans tellement de films Troma!). Il y a même une histoire d’amour (!) et un hommage (de marde) à The Shining, gang. Fou raide.
Le tout se décline dans une espèce de musical en cinq actes, des années 1980 à nos jours, dont le récit est très librement inspiré de la pièce The Tempest de William Shakespeare, qui fait des apparitions rigolotes ponctuant le long métrage de 94 minutes, incluant plein de punk et de rock sur la trame sonore (comme Green Jellö et Motörhead). À Tromaville, New Jersey (cité fictive où se déroulent tous les films de Kaufman), on se fait un malin plaisir, voire un devoir d’être politiquement incorrect, où une vulgarité n’attend pas l’autre, ni un changement abrupt de ton (y’a même un segment animé!).
En plus de s’éclater solide en jouant deux rôles (!!), Kaufman revisite ici ses thèmes de prédilection, soit l’œuvre de Shakespeare (comme dans son très fun Tromeo and Juliet, présenté à Fantasia en 1997), les violents effets secondaires de certaines drogues (comme dans Class of Nuke ‘Em High, dont le premier volet de sa suite fut également présenté au festival en 2013) et la critique sociale (comme la pollution dans The Toxic Avenger et la malbouffe dans Poultrygeist). Ici, on tire à boulets rouges sur tout ce qui bouge: soit l’influence des réseaux sociaux, les enjeux de diversité (Troma a toujours été très inclusif et ouvert), la politique américaine, l’appropriation culturelle, la génétique et les pharmaceutiques passent tous dans le tordeur, entre autres.
Les habitués savent que beaucoup des acteurs de la troupe de Troma sont de type amateur, manquent de timidité et se plaisent à surjouer à outrance, ce qui cadre parfaitement avec l’extravagance de la production. Au registre des caméos, on retrouve l’acteur porno Ron Jeremy (on a pu apercevoir sa grosse, hu-hum, moustache dans plusieurs réalisations de Kaufman, dont The Toxic Avenger IV: Citizen Toxie) et de la scream queen indie Debbie Rochon (aussi vue dans Terror Firmer).
Bref, si vous adorez les délires gore (style Bad Taste et Dead Alive d’un jeune Peter Jackson) et autres films remplis de mutants (comme The Island of Dr. Moreau et le Society de Brian Yuzna) en sauce Troma, j’ose espérer que vous avez invité quelques amis samedi le 29 août et que vous n’avez pas manqué la première mondiale de #ShakespearesShitstorm à Fantasia. Sinon, vous ne perdez rien pour attendre… mais d’ici là, n’oubliez pas les potes: du Troma, ça s’apprécie encore mieux sous influence, soit avec quelques canettes bien frettes et/ou un peu de pot.
Voyez également notre entrevue vidéo (en français!) avec Lloyd Kaufman.
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