Le Québec a produit beaucoup de films d’horreur. Outre les titres populaires qu’on connaît bien, des dizaines de longs-métrages indépendants ne demandent qu’à être découverts. Parmi ceux-ci se trouve Draghoula, un film de vampires oublié sorti en 1995, soit un an avant Karmina. Écrit, réalisé et produit par Bashar Shbib, ce film tourné en anglais à Montréal a également parmi ses producteurs exécutifs Richard Goudreau, créateur et producteur de Les Boys. Jamais sorti en DVD, mais disponible en vidéo sur demande, ce film mérite-t-il d’être redécouvert ou devrait-on le laisser dans l’oubli?
Harry (Chriss Lee) est un jeune scientifique juif qui vit avec sa mère surprotectrice et autoritaire, Ida (Victoria Barkoff). Il passe le plus clair de son temps dans son laboratoire à essayer d'isoler le gène de la culpabilité en utilisant des rats vivants pour ses tests. Lorsque la direction du laboratoire annonce une réduction budgétaire importante, il ne peut plus se permettre autant de rats qu'il aurait besoin pour poursuivre ses recherches. Mais l'homme ne désespère pas et trouve une agence fournissant des rats de Transylvanie à très bas prix. Lorsqu'il est mordu par l'un de ces spécimens, sa vie tranquille prend un tournant assez radical...
En se transformant en vampire, Harry va jouir d’un sentiment de liberté et voudra par le fait même découvrir sa sexualité. Il se rase, se travestit et se maquille pour déambuler dans les rues la nuit afin de séduire hommes et femmes afin de s’abreuver de leur sang. On ignore pourquoi le personnage subit une telle transformation, mais une chose est sûre, ça ajoute des couleurs à cette production particulière.
Chriss Lee, qui était musicien pour le groupe Talamasca, a été découvert par le réalisateur qui aimait le style vampirique de la formation. C’est d’ailleurs Lee qui a composé la musique du film. N’étant pas acteur, on peut lui pardonner quelques maladresses, mais il reste qu’il se débrouille plutôt bien. Stéphanie Seidle, qui joue son assistante Sabrina qui développe un intérêt amoureux pour lui, joue également son seul et unique rôle en carrière, plutôt aussi inégal. Le fait de choisir des acteurs débutants n’était peut-être pas la meilleure idée et enlève un peu de crédibilité au film.
On aime le moins le personnage d’Ida, plutôt mal joué. Elle s’inquiète beaucoup pour Harry qui subit des changements, sans savoir qu’il est devenu vampire, mais la femme est si envahissante qu’elle devient agaçante. Elle couve trop son fils et le fait sentir coupable de vouloir déménager pour vivre sa vie. On l’apprécie un peu plus lorsque son rôle change pour devenir un personnage comique et ridicule. Ida demande l’aide d’une gitane afin de percer le mystère de Harry et les deux femmes deviennent ainsi le duo loufoque du film. Devant la défaite de l’ail et du crucifix qui n’ont aucun effet, elles doivent plutôt utiliser une ménorah et le livre de Moïse contre la vampire juive… Sabrina, quant à elle, préfère étudier le sang de Harry afin d’inventer un antidote.
Le film renferme quelques moments délicieux où on se demande vraiment à quoi le réalisateur a pu penser. Sans trop en dévoiler, ces scènes contiennent crottes de chien, pisse et la mention d’une mineure n’ayant pas encore ses règles… Les amateurs d’idées sordides se plairont avec Draghoula. Il y a quelques longueurs dans les escapades nocturnes du vampire, mais certaines renferment quelques idées particulières, qui s’ajoutent à la thématique LGBTQ+. La finale est plutôt pénible et tombe toutefois à plat avec une poursuite interminable dans les rues entre les personnages.
En regardant cette production loufoque, on comprend pourquoi elle n’a pas trouvé son public à l’époque. C’est le genre de film que l’on aurait pu découvrir à Fantasia. Malgré ses défauts, Draghoula est tout de même divertissant et très drôle. La manière dont on traite les tabous de la sexualité est audacieuse pour un film des années 90 et lui procure un certain charme qu’on ne retrouve pas ailleurs. Cette production a certes sa place dans l’histoire du cinéma du genre au Québec et les amateurs de séries B inusités devraient y jeter un œil.
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