Le 4 décembre 1998, prenait l’affiche le remake du chef-d’oeuvre d’Alfred Hitchcock, Psycho. Après une campagne de promotion houleuse pendant des mois, Universal Pictures connut l’un de ses flops les plus mémorables. Même que certains pays ont banni l’affiche du film, la qualifiant de dérangeante. Mais pourquoi? Pourquoi tant de haine? Et surtout, qui avait osé toucher à ce classique qui était déjà si parfait? Il faut admettre qu’il fallait un sale culot pour embarquer dans un tel projet et nous devons remercier Universal de ne pas l’avoir mis dans les mains de n’importe qui.
Le principal concerné est Gus Van Sant. Réalisateur à la filmographie éclectique à qui l’ont doit entre autres My Own Private Idaho, Milk, To Die For, Elephant et, bien sûr, l’oscarisé Good Will Hunting. À une époque où les remakes n’étaient pas aussi fréquents que maintenant, il fallait être audacieux pour refaire un des plus grands films du cinéma, et ce, plan par plan. Fraîchement sorti de sa période Will Hunting (pour lequel il a reçu la nomination de meilleur réalisateur), Van Sant s’attaqua à l’un de ses films préférés. Il choisit donc de reproduire le film de 1960 le plus fidèlement possible, à la virgule près.
Il décida donc de le tourner en couleur, changer quelques détails (dont le montant d’argent volé par la protagoniste qui passe 40,000$ à 400,000$) et d’y mettre des acteurs populaires du moment dont Anne Heche (I Know What You Did Last Summer), Vince Vaughn (The Cell), Julianne Moore (Boogie Nights), Viggo Mortensen (A Perfect Murder) et plusieurs autres. Bien sûr, rien à voir avec les performances de Janet Leigh et Anthony Perkins…
Et voilà l’erreur que nous avons tous faite. La comparaison.
Croyez-le ou non, le Psycho de Gus Van Sant n’est pas aussi mauvais que l’ont peut le croire. En fait, il n’est pas mauvais du tout. Pour pouvoir l’apprécier, le spectateur doit faire abstraction de l’original. Impossible? Pas du tout. Il faut voir cette reprise comme étant un exercice. Un défi personnel que le réalisateur s’est promis de relever. Certains l’ont vu comme de l’arrogance et d’autres comme un hommage au maitre du suspense. La deuxième option est plus que probable, vu l’énorme respect et admiration que Van Sant a pour Hitchcock.
La fille d’Alfred, Patricia Hitchcock, avait même approuvé le produit final disant que c’était quelque chose que son père aurait aimé faire. Ce qu’il fit en 1956, avec son propre film The Man Who Knew Too Much de 1936 (mais sans le plan par plan).
Bien sûr, outre la couleur, cette «nouvelle» mouture contient plusieurs différences à commencer par la plus mémorable: la scène où Norman se masturbe en regardant sa victime depuis la pièce d’à coté. Différence énormément critiquée mais qui, avouons-le, était quand même réaliste, malgré qu’elle n’aurait certainement pas passée en 1960.
La scène de la douche comporte aussi son lot de contrastes. Lorsque la pauvre Marion (Heche) se fait assassiner, on peut rapidement y voir une série d’images apparaitre (voir ci-dessus). Difficile d’expliquer ce qu’elles signifient, mais on se doute bien qu’elles viennent de l’imaginaire dérangé de Bates.
Bien sûr, les acteurs font aussi partie des changements apportés et tous se débrouillent très bien. Vince Vaugh est surprenamment inquiétant dans le rôle de Norman et Anne Heche réussit à transmettre toute la fragilité et la naïveté de Marion. On se demande juste comment elle a réussi à obtenir le rôle en faveur de Nicole Kidman, Drew Barrymore, Julianne Moore et Laura Linney. L’histoire ne le dit pas.
Profitons donc de la saison pour revisiter ce mal-aimé du cinéma avec un second regard. Maintenant que nous sommes à l’époque d’un remake (ou deux) par semaine, prenons-le pour ce qu’il est. Sans être inoubliable, Psycho (1998) mérite notre attention et surpasse, sans l’ombre d’un doute, tous les Blair Witch et Poltergeist (2015) de ce monde et ne mérite certainement pas toute la haine reçue depuis bientôt vingt ans. Peace.
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