Parfois, par chance, nous pouvons tomber sur une œuvre que l’on sait destinée à devenir un futur classique. Un livre, un film, un jeu, peu importe le média que l’on expérience, il marque et inspire. Certains artistes le feront avec une simplicité déconcertante, d’autres avec une complexité labyrinthique, mais satisfaisante; peu importe la façon dont ces gens s’y prennent, le résultat laissera une marque chez les gens qui lui ont donné une chance. C’est le cas de la bande dessinée Beneath The Trees Where Nobody Sees de Patrick Horvath, publiée chez IDW Publishing et parue tout récemment en format intégral.
Samantha Strong est une tueuse en série avec un code personnel. Ses meurtres sont autorisés tant et aussi longtemps qu'elle ne les fait pas dans sa petite ville natale de Woodbrook, où elle habite. Cependant, un mystérieux rival apparaît et semble ne pas avoir les mêmes limitations, commençant à tuer les citoyens de son petit patelin. Les témoins et survivants de ces tueries risquant maintenant de découvrir les crimes de Samantha et les révéler au grand jour, cette dernière doit résoudre l'affaire... et au plus vite.
La plus grande force que l’auteur-dessinateur apporte à son récit est une maîtrise absolue d’une technique littéraire et visuelle : le contraste. Le matériel sujet (le meurtre et ceux qui décident d’en commettre) crée une friction avec le choix stylistique des personnages anthropomorphes dessinés de manière plutôt bon-enfant. Des taupes, des souris et des chats qui ont les mêmes occupations et vêtements que des humains, habitant une petite ville paisible comme dans un album jeunesse, mais avec des moments plus gore, créé un ensemble quasi-humoristique, sans pour autant tomber dans la farce ou la facilité.
Ce contraste est même poussé plus loin avec, non seulement, les designs des personnages et des décors, mais aussi le choix de colorisation. Les tons vifs, le pastel et l’utilisation des couleurs chaudes et froides de manière experte poussent encore plus l’aspect livre pour enfant, l’auteur se commettant pleinement et ouvertement, autant à son approche qu’à son concept. Le tout réussit à simuler une sorte de simplicité volontaire au niveau de la stylistique sans pour autant sacrifier les détails, les inflexions des personnages ainsi que le sujet source qui font le cœur du récit.
La narrative est aussi bien menée avec notre protagoniste Samantha, une ourse aux allures plutôt joviales, menant la progression et les tournures avec panache. Loin d’être une héroïne, son raisonnement, son parcours et ses méthodes deviennent autant abjects que fascinants. Il s’agit d’une véritable psychopathe qui s’assume, mais qui pourtant réussit à évoluer à travers les déboires de l’histoire. Avec, en plus, la communauté de Woodbrook regorgeant de figurants et personnages secondaires tous bien intéressants, on constate rapidement que le récit est aussi à la hauteur des visuels.
Le seul petit bémol qui pourrait être attribué à Beneath The Trees Where Nobody Sees, sans gâcher une certaine surprise, est l’ambiguïté d’un élément clé de l’histoire. Sans dévoiler la chose en question, l’introduction d’un concept fort intéressant, mais non expliqué, pourrait générer une certaine insatisfaction chez les lectrices et les lecteurs. Rien qui gâche le tout, bien entendu, mais cette idée était si particulière qu’en savoir plus aurait profondément enrichi le livre dans son ensemble.
Malgré tout, recommander cette bande dessinée est d’une facilité déconcertante. Pour une première œuvre dans le domaine, Patrick Horvath prouve qu’il a l’étoffe d’en produire davantage et nous attendons à de grandes choses dans son avenir. À lire au plus vite!
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