Après un bouche-à-oreille globalement positif, May the Devil Take You (Sebelum Iblis Menjemput) obtient enfin une distribution à grande échelle grâce à Netflix. En effet, bien que possédant le logo «a Netflix Original Production», le géant du web n’a pas agi comme producteur du métrage, mais uniquement comme distributeur. Cela se ressent et pourra créer une frustration chez ceux qui s’attendent à un film totalement décomplexé, comme le permet la plateforme reconnue pour donner une très grande liberté aux réalisateurs qui collaborent avec elle.
Le film n’en demeure pas moins d’une certaine qualité. Racontant de manière très simple l’histoire d’une famille prisonnière d’une cabane dans les bois habitée par une entité démoniaque, le nouveau long-métrage de Timo Tjahjanto (le segment Safe Haven de V/H/S/2) est mémorable. Les comédiennes interprétant Alfie (Chelsea Islan) et Maya (Pevita Pearce), deux demi-sœurs ayant des problèmes à régler, sont particulièrement justes. De plus, le travail sur l’ambiance cauchemardesque, avec ses couleurs criantes et sa bande-originale suintant les violons dissonants est particulièrement réussi. Notons également les maquillages délicieusement kitsch des créatures à mi-chemin entre les fantômes nippons de The Grudge et les deadites de The Evil Dead.
Ces comparaisons sont totalement justifiées. D’ailleurs, si vous avez déjà entendu parler de ce film avant, fort est à parier que c’était en le vendant comme possédant une patte raimiesque. Il y a du The Evil Dead dans May the Devil Take You, ça ne fait aucun doute. On a, par exemple, droit au «gimmick» de la caméra-esprit qui se promène dans la maison dans toutes sortes d’angles improbables en se permettant des zooms et des mouvements très rapides. Notons aussi le choix de représenter les créatures frontalement, en assumant certains aspects plus comiques. On a presque l’impression, par moments, de voir des scènes tirées de Drag Me to Hell, ce qui n’est pas pour déplaire.
Toutefois, le film possède une retenue difficile à expliquer au niveau de sa gestion de la violence et du gore. Pour un projet se réclamant autant de l’influence de l’horreur américaine, et particulièrement de Sam Raimi, le tout est assez propre. Il s’agit probablement d’une décision de production visant à mieux le vendre, mais on reste sur notre faim. On ne peut que se demander jusqu’où le film aurait pu aller s’il avait au moins daigné montrer ses morts à l’écran ou ne serait-ce que faire couler un peu de sang en plus de la bile noire. Cela est d’autant plus étrange que la réalisation précédente de Tjahjanto, The Night Comes for Us (aussi distribué par Netflix), était beaucoup plus assumée à ce niveau, bien que possédant de sérieuses lacunes de scénario…
Espérons donc qu’après ces essais de distribution, Netflix prendra le risque de financer comme producteur un projet plus libre du réalisateur. Il serait peut-être temps d’enfin lui donner les moyens de ses ambitions. En effet, en alliant le jusqu’au-boutisme formel de son précédent métrage à un délire frontal à la May the Devil Take You, on pourrait avoir enfin droit à un très grand film.
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