Il y a 25 ans aujourd’hui sortait en salle Village of the Damned (Le village des damnés), un remake signé John Carpenter. Le film original, datant de 1960, était une adaptation du roman The Midwich Cuckoos de l’auteur britannique John Wyndham. Aujourd’hui considéré par plusieurs comme étant un film culte du cinéma d’horreur, la version de Carpenter reçut pourtant un accueil plutôt tiède et fut même parfois présentée comme l’une de ses moins bonnes réalisations.
À l’aube, alors que ses habitants se réveillent tranquillement, une mystérieuse ombre survole le petit village de Midwich. C’est jour de fête et tous s’affairent autour de l’école pour préparer cet événement bien spécial. Cependant, à 10h précisément, cette force invisible endort subitement tout ce qui y vit et aux alentours. Pendant six heures, les résidents, de même que leurs animaux, demeurent inertes avant que, sans savoir pourquoi, ils soient brusquement réveillés.
Quelques semaines passent et le médecin de la ville réalise que plusieurs femmes sont maintenant enceintes et que leurs grossesses semblent avoir un lien avec le mystérieux événement. Neuf mois plus tard, après que ces dix femmes aient accouché simultanément, les villageois réalisent que les enfants ont plusieurs caractéristiques communes. Ils ont les cheveux blancs et très soyeux, un regard étrange et ils se ressemblent terriblement. Lorsqu’ils gagnent en autonomie, il devient plus qu’évident que ces enfants ont quelque chose de diabolique. Les suicides, accidents mortels et autres incidents inexplicables se multiplient autour de ces marmots, qui marchent en rang comme des militaires et qui semblent vivre en parfaite symbiose.
Il est plutôt difficile de ne pas apprécier un film qui présente une histoire si singulière, mêlant l’étrange au familier, et dont les protagonistes sont des enfants diaboliques. Le scénario est efficace, l’introduction est intrigante, et même s’il est vrai que le rythme du film est trop lent pour réellement surprendre le spectateur, l’action coule assez bien.
Et que dire de la distribution? Il y a Christopher Reeve (Superman), en pleine forme dans le rôle principal (qui fut d’ailleurs son dernier rôle avant son terrible accident). On y retrouve également Kirstie Alley (Star Trek 2) et la ravissante Linda Kozlowski (Crocodile Dundee), qui donnent la réplique à Reeve. Impossible de passer sous silence la présence de Mark Hamill (Star Wars) dans le rôle du révérend, ainsi que la toute première apparition de Lindsey Haun (Star Trek: Voyager, True Blood) au grand écran, dans le rôle de la diabolique Mara Chaffee.
Avec un scénario solide et des acteurs d’expérience, comment peut-on alors expliquer que Village of the Damned ait reçu un accueil aussi froid?
En fait, comme il est commun avec plusieurs remakes, la critique a principalement jugé que le film de Carpenter était trop similaire à l’original pour réellement le surpasser. On lui a essentiellement reproché d’avoir refait le film avec du meilleur matériel, ajouté des effets spéciaux et de la musique moderne, sans avoir réussi à réinventer le film original réalisé par Wolf Rilla. De plus, la version de 1995 n’était qu’un banal film d’horreur, contrairement à la version controversée de Rilla qui diabolisait le miracle de la vie dans une Angleterre conservatrice, à une époque où les croyances religieuses définissaient les mœurs.
Les critiques négatives virent de toutes parts: on reprochait à Carpenter d’avoir à la fois réalisé un film presque identique à l’original, mais également d’avoir pris des libertés avec celui-ci. Plusieurs ont pointé du doigt le jeu d’acteurs des enfants, ou encore affirmé que la prestation de Reeve n’égalait tout simplement pas celle de George Sanders, le héros du film initial. Certains ont prétendu que le réalisateur avait un agenda féministe caché; ce qui l’avait poussé à remplacer David, le chef des enfants dans le film original, par la fillette du nom de Mara.
Cependant, pour les adolescents nés dans les années 80, Village of the Damned était surtout l’un des films d’horreur prometteurs qui venaient d’arriver au club vidéo. La plupart d’entre-eux ignoraient qu’il s’agissait d’un remake et ont pu en profiter pleinement sans perdre leur temps à faire des comparaisons avec un film paru 35 ans auparavant. Parce qu’avant tout, ce film présente un scénario captivant avec une intrigue intéressante.
Malheureusement, cette même intrigue devient évidente trop tôt dans le film et la tension qui tenait le spectateur en haleine se dissipe alors rapidement. Les enfants sont les ennemis; ils représentent le danger. Une fois que le spectateur est bien à l’aise avec ce fait et qu’il a compris l’étendue de leurs pouvoirs télépathiques, le reste devient sans surprise. Sans être totalement prévisible, le suspense faiblit et le rythme du film s’essouffle un peu. L’ambiance reste néanmoins inquiétante et les scènes d’action explosives offrent le soutien nécessaire pour garder l’attention du spectateur jusqu’à la toute fin.
Notons également que la cinématographie est magnifique et ce film contient quelques scènes marquantes. On se souviendra longtemps de la mère de la petite Mara qui plonge à répétition son bras dans une marmite d’eau bouillante, ou encore de la femme du révérend qui s’immole en pleine rue. S’il est vrai que la performance de Kirstie Alley est un peu caricaturale et douteuse, celles de Reeve et des enfants sont néanmoins très convaincantes. Lindsey Haun, qui incarne la leader des bambins diaboliques, est tout simplement excellente.
D’accord, ce n’est pas un film très intense ou sanglant. Ce n’est probablement pas un incontournable de l’horreur ou de la science-fiction, et on se souviendra plutôt de lui comme d’un échec commercial. Le réalisateur avait lui-même mentionné, au cours d’une entrevue en 2011, que «ce contrat ne l’avait pas particulièrement passionné». Malgré tout, il s’agit quand même d’un film old school bien potable, qui méritait sans doute un meilleur accueil que celui qu’il a reçu. Si vous ne l’avez jamais vu, Village of the Damned pourrait vous offrir une soirée popcorn intéressante.
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