La fin de l’hiver, cette période de transition que sont les mois de mars et d’avril, est un moment de célébration pour plusieurs. C’est à ce moment que l’on assiste à l’équinoxe du printemps, qui nous mène doucement vers des jours plus longs et ensoleillés. Renouveau et renaissance sont dans les esprits.
Toutefois, au coeur de ce moment rempli d’espoir se cache quelque chose de plus mystérieux, quoique tout aussi festif. La nuit du 30 avril au 1er mai, les divinités du printemps chassent les reliques de l’hiver, les sorcières sortent leurs balais et de grands feux s’allument à travers l’Europe. C’est la nuit de Walpurgis.
« La superbe nuit du sabbat agit déjà sur tous mes membres; elle revient pour nous après demain, et l’on sait là pourquoi l’on veille. »
— Méphistophélès, dans Faust (Goethe, 1828)
Des rituels païens à Sainte Walburge
Connues sous les noms de Hexenbrennen, Hexennacht (hexen: sorcières, nacht: nuit, brennen: brûler), Beltaine, May Day ou encore Walpurgis, les célébrations du 30 avril au 1er mai ont des racines anciennes à travers l’Europe. Chassant l’hiver et accueillant le printemps, divers cultes païens célèbrent en effet cette période de transition.
Walpurgis ne fait (presque) pas exception à la règle. Fête aux origines païennes, elle prend racine dans des rituels liés aux thèmes de la fertilité et des récoltes. Pourtant, son nom provient d’une sainte catholique, Sainte Walburge.
Sœur missionnaire anglo-saxonne, Walburge a voué sa vie à la conversion des païens dans les territoires qui recouvrent actuellement l’Allemagne. Son œuvre pieuse l’amènera à s’installer à Heidenheim où elle deviendra abbesse. Issue d’une famille de saints (son père, ses deux frères et son oncle ont tous été canonisés), elle suivra cette même destinée. Après sa mort, en 779, ses restes sont transférés aux côtés de son frère à Eichstatt. Mais le repos de Walburge est de courte durée: de sa tombe, coule une huile miraculeuse aux vertus guérisseuses. Des pèlerinages s’organisent et les miracles commencent. Le 1er mai 870, elle est canonisée par le pape et ses reliques sont envoyées dans la vallée du Rhin, en France et en Flandres, diffusant son culte dans différentes régions d’Europe.
Tout cela n’intéresserait pas notre propos si ce n’était la date (probablement symbolique) de canonisation de Sainte Walburge, le 1er mai. Autrement fête du début de printemps, la nuit du 30 avril au 1er mai devient, au Moyen-Âge, celle du sabbat des sorcières. En pleine lutte contre les hérésies, les autorités ecclésiastiques s’effraient de voir rapporter des histoires de cultes démoniaques, de rencontres secrètes et d’autres célébrations orgiaques. Pour se protéger de l’influence négative des sorcières, ils suggèrent alors appel à Sainte Walburge.
Les origines païennes de la fête peuvent également être remarquées dans les attributs de Sainte Walburge, qui est souvent représentée avec des épis de maïs. Cette imagerie réfère à la protection des récoltes, que l’on retrouve également associée à Walborg, déesse de la Terre.
Faust à la rencontre des sorcières
L’association de la nuit de Walpurgis aux sorcières est re-popularisé au 19e siècle par la pièce de théâtre Faust de Goethe. Ayant vendu son âme au diable Méphistophélès, Faust est embarqué dans une aventure en quête de savoir. Leur périple les mène finalement dans les montages Harz, le soir de Walpurgis. Au plus haut sommet, appelé Brocken, se réunissent sorcières et esprits pour célébrer le diable. Faust assiste alors au Sabbat, durant lequel les sorcières chevauchent balais et cochons, suivis par des sorciers dans une danse infernale. Il se joindra d’ailleurs à cette danse pour un court moment.
Les grands feux
Aujourd’hui, dans certaines régions d’Europe, notamment en Allemagne, Belgique, France, aux Pays-Bas, en République tchèque et en Scandinavie, la nuit de Walpurgis est toujours célébrée.
Dans sa forme contemporaine, Walpurgis est célébrée en allumant des grands feux, censés brûler l’esprit de l’hiver et repousser les sorcières et autres mauvais esprits. Parfois, des effigies de pailles sont sacrifiées durant ces feux (pensez à The Wicker Man, mais en moins violent). Certaines traditions privilégient les déguisements et les farces, un peu à l’image du carnaval. D’autres, comme en Finlande, célèbrent les feux qui brûlent les sorcières.
Dans tous les cas, Walpurgis est une fête communautaire, à laquelle est conviée toute personne désirant exorciser les fantômes de l’hiver et accueillir le printemps, tout autant que célébrer le renouveau aux côtés des diables et des sorcières.
Le Sabbat continue…
- Livres
- Musique
- Walpurgis, la version originale de la pièce War Pigs de Black Sabbath
- Repent Walpurgis de Procol Harum
- Walpurgis Night du groupe black metal belge Enthroned
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.