Durant la grande migration afro-américaine des années 1910 à 1970, six millions de personnes ont quitté le sud des États-Unis pour échapper au racisme et trouver des emplois dans les villes industrialisées du Midwest, du Nord-Est et de l’Ouest.
Them s’ouvre sur les sinistres raisons pour lesquelles les Emory ont décidé de fuir la Caroline du Nord vers le soleil de la Californie, en 1953. Le patriarche (Ashley Thomas, The Night Of) y a en effet dégoté une magnifique demeure pour repartir à neuf. Pour les habitants de la petite banlieue idyllique exclusivement blanche, l’arrivée de la nouvelle famille représente une véritable tache sur leur existence d’apparence parfaite. Pour les Emory, il s’agit littéralement du premier jour d’un tout nouveau cauchemar qui les plongera au cœur de l’enfer.
La toute nouvelle série anthologique d’Amazon Prime, créée par l’auteur et producteur Little Marvin, se donne comme mandat d’explorer la terreur en Amérique et sa première saison, sous-titrée Covenant, nous entraîne dans une spirale de violence et de terreurs perpétrées au nom de l’ignorance et du racisme qu’il entraîne. La prémisse, où les membres de cette petite famille subissent en premier lieu les sévices du voisinage, n’est pas sans rappeler la trame des récents Lovecraft Country et His House, parus l’an dernier, mais développe pourtant un langage qui lui est propre.
Une poignée de cinéastes pour la plupart établis dans le genre — mentionnons entre autres Craig William Macneill (Lizzie, Channel Zero), Daniel Stamm (The Last Exorcism), mais surtout la star Ti West (The House of the Devil, The Sacrament) — s’allient ici pour offrir une réalisation impeccable et surtout efficace, qui nous glisse littéralement dans la peau de ces personnages en situation de crise (cette scène où la cadette (Shahadi Wright Joseph, Us) se retrouve intimidée en pleine classe est suffocante!) et où la tension menace parfois même de nous faire chavirer. C’est particulièrement le cas d’épisodes plutôt sensibles, notamment le cinquième et l’avant-dernier, «Covenant 1.» et «Covenant 2.». Les créateurs choisissent en effet d’en montrer beaucoup lors de ces segments très difficiles à regarder, qui ont valu aux producteurs les foudres de certains critiques et spectateurs. Soyez avisés.
La musique occupe une grande place dans Them. Les hits doo-wop et autres chansons classiques des années 50 à 70 ponctuent les événements sordides et procurent énormément de rythme et de couleur à l’ensemble, jusqu’à parfois même remplacer les dialogues, comme lorsque l’hymne iconique du mouvement des droits civiques afro-américains Young Gifted and Black de Nina Simone se fait entendre lors du crescendo final. Dommage d’ailleurs que les derniers épisodes n’aient pas le même poids que la première moitié de la série. En effet, on peut reprocher au scénario de s’éparpiller en offrant des dénouements plutôt curieux à certains de ses meilleurs personnages. On pense surtout à celui de Betty (Alison Pill, American Horror Story), assurément l’une des antagonistes les plus détestables de l’année, qui se perd dans une intrigue complètement inutile. Imaginez l’affrontement épique qu’on aurait pu avoir!
Autrement, on a droit à des performances percutantes de l’ensemble de la distribution, mais c’est évidemment celles du quatuor principal dont on se souviendra; Ashley Thomas, Deborah Ayorinde (Harriet), Shahadi Wright Joseph et la jeune et adorable Melody Hurd (Trick) nous tiennent littéralement par les tripes durant ces dix épisodes dévastateurs.
Malgré quelques maladresses scénaristiques, Them s’inscrit parmi les séries d’horreur les plus percutantes de l’année. Un nouveau American Horror Story est né chez Prime? L’avenir nous le dira.
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