À la fois simple mortel et bête sanguinaire incapable de résister à ses pulsions, le loup-garou se distingue des autres créatures folkloriques par sa dualité. Dans The Beast Within, Alexander J. Farrell ajoute un autre niveau à sa monstruosité grâce à une idée aussi simple qu’inusitée : et si la lycanthropie n’était qu’une excuse pour justifier la cruauté d’un homme violent? Un concept intéressant, certes, mais pauvrement exécuté. On vous explique pourquoi.
Atteinte d'une maladie pulmonaire, la jeune Willow vit au fond des bois. Sans partenaire de jeu, elle compte sur son imagination et la compagnie de sa mère et de son grand-père pour faire passer le temps. Malgré l'isolement de la campagne, la paix n'est pas au rendez-vous et son quotidien est bousculé par les sautes d'humeur de plus en plus violentes de son père. Chaque nuit de pleine lune, sa mère l'enchaîne à l'extérieur et met à sa disposition des animaux de ferme qu'il tue vicieusement. En observant la déchéance de son patriarche, l'enfant découvre petit à petit la nature de la malédiction qui tourmente les hommes de sa famille paternelle.
Ne vous laissez pas tromper par l’ambiance lugubre et le spectre du loup-garou : The Beast Within n’est pas un film d’horreur, mais plutôt un drame familial où le monstre sert de métaphore pour la violence conjugale et familiale. Et qui sait, peut-être que l’idée aurait fonctionné avec un interprète plus convaincant. Car si Kit Harington portait si bien la cape noire de la Garde de nuit dans Game of Thrones, on ne peut en dire autant du poil de la bête. L’acteur semble distrait, désintéressé. Pour sa défense, incarner un homme instable qui passe du père aimant au conjoint abusif en un clin d’œil présente certainement son lot de défis. Reste qu’on le croyait assez expérimenté pour comprendre que quelques faibles grognements et un rictus forcé ne suffiraient pas à nous convaincre du danger présenté par son personnage.
Harington a beau être le maillon le plus faible de la distribution, les autres acteur⸱trice⸱s ne brillent pas pour autant. James Cosmo (Braveheart) s’emmerde visiblement dans son rôle de grand-père tandis que la petite Caoilinn Springall s’en sort de façon correcte, mais non mémorable. De loin la plus investie de l’ensemble, Ashleigh Cummings (NOS4A2) communique avec efficacité les émotions conflictuelles d’une femme partagée entre le devoir de protéger son enfant et l’amour qu’elle porte à son mari. Face à l’incapacité de Farrell à créer un climat de suspense, c’est au dévouement de l’actrice qu’on doit les rares moments de tension. Dommage que, le scénario ayant négligé d’approfondir les personnages, son jeu est condamné à demeurer unidimensionnel, sans grande variété de tons et d’expressions.
La force de The Beast Within réside dans le décor du Yorkshire de l’Ouest, où les ruines de Harewood Castle et de la forêt qui les environne composent un paysage mélancolique et figé dans le temps qui évoque les contes de fées. La demeure elle-même comporte des éléments sauvages et féériques, comme un lustre en bois de cervidés et des murales qui représentent la lune. Hélas, la direction artistique, la trame sonore originale et la cinématographie gothique ne suffisent pas à rescaper cette œuvre dont les failles multiples comprennent le choix de faire se dérouler une grande partie de l’action en hors-champ.
Affaibli par un scénario vide et la performance décevante de Kit Harrington, The Beast Within s’avère bien moins futé et innovateur qu’il semble le croire. Force est d’admettre qu’il ne sera jamais plus qu’une simple parenthèse dans le bestiaire des films de loups-garous. Thank you, next.
Cette critique était publiée dans le cadre du festival Fantasia.
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