Le hic avec Sacrifice (disponible sur demande le 9 février et en Blu-ray le 23 février), cet énième hommage à l’étrange œuvre d’H.P. Lovecraft, c’est qu’il ne livre pas la marchandise. Non sans avoir essayé, par contre. Après un intrigant prologue, on se retrouve un quart de siècle plus tard dans un petit village norvégien. Isaac (Ludovic Hugues, Ride), un jeune américain, revient dans son natal patelin, avec sa copine Emma qui est enceinte de plusieurs mois (Sophie Stevens, The Haunted), afin de vendre la lugubre et poussiéreuse maison de son enfance. Il est d’abord reçu par les locaux de façon plutôt hostile (à la An American Fish Fan in Innsmouth), avant qu’on ne découvre ses racines scandinaves. C’est alors qu’on l’accueille à bras ouverts dans la communauté en l’initiant aux énigmatiques rites folkloriques du coin, au grand dam d’Emma, aux prises avec des cauchemars de plus en plus intenses, mettant en vedette le légendaire “slumbering one“.
Bien que ça ne soit pas une adaptation per se d’un récit du susmentionné romancier (Chtulhu n’est pas nommé), tous les éléments habituels y sont. Comme dans l’efficace Dagon (2001) du regretté Stuart Gordon, on y retrouve un village de pêche, des locaux étranges (dont une sexy nymphe campée par la mannequin Johanna Adde Dahl), des tentacules, une langue inventée, de la violence, des rituels cultes et beaucoup, beaucoup d’aquatiques références (non, pas très subtil). Dans le rôle du shérif nordique (à l’accent intermittent), on ne se surprend pas de voir la toujours souriante Barbara Crampton, qui a beaucoup joué de Lovecraft pour Gordon – notamment dans Re-Animator, Castle Freak et From Beyond. D’ailleurs, Sacrifice reprend les couleurs insolites de ce dernier, les mêmes ayant également joyeusement recouvert le récent Color Out of Space.
Alors que viennent à l’esprit des classiques d’hier à aujourd’hui comme Get Out et Rosemary’s Baby, les éléments païens du long métrage rappellent plutôt l’original The Wicker Man et l’excellent Midsommar, avec son décor tout aussi scandinave. Là où le bât blesse, c’est surtout avec le dernier acte, qui sur notre appétit nous laisse. On lui aurait pardonné sa trame sonore (oppressante) bien trop appuyée sur toute la durée et ses acteurs dont le jeu sombre parfois du côté théâtre d’été, si seulement on avait eu droit à une finale un peu plus crazy. Mais non. Rien de réellement saisissant, ni trop salissant ici. Tout est trop propre, justement. De jolis acteurs et actrices, des images magnifiques (dont des aurores boréales!) et une caméra dynamique, qui nous laissent deviner que ses réalisateurs Andy Collier et Toor Mian sont probablement des fans finis de maîtres comme Kubrick et Raimi.
Comme chantait Gerry, on nous avait monté un beau grand bateau, en développant une intrigue impliquant vraisemblablement de repoussantes culminations ou autres abominations sans nom… pour qu’au final on se dise «tout ça pour ça?» Oui, il y a bien une sacrifice (‘scusez-la!) de belle décapitation en fin de parcours, mais reste que ça manque un peu de viande et d’écrapou. Un sacrément léché trip, certes, bien que pas très inspiré et, hélas, sans tripes.
P.S.: Pour du Lovecraftien moins beau, mais beaucoup plus ortho, (re)tapez-vous donc plutôt un petit Gordon comme Dagon ou même la refonte de Castle Freak avec un six-pack.
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