On a peut-être abusé en vous promettant un film perturbant qui allait tester votre gag reflex. Swallow n’est pas le genre de titre qu’on visionne dans le but de repousser ses limites. C’est plutôt une étude de caractère touchante, construite autour d’un personnage fascinant.. et oui, pimentée de quelques séquences dégueulasses. En cette demeure, il y a plus de Todd Haynes que de David Cronenberg.
Le film nous met dans la peau d’Hunter. Elle vient de se marier à Ritchie, un type au physique parfait qui descend d’une famille fortunée. Dans son immense demeure, Hunter est comme une bouteille à la mer. Sa solitude est écrasante et n’a d’équivalent que le contrôle de plus en plus restreignant qu’exerce son entourage sur toutes les facettes de son existence. Alors qu’elle apprend être enceinte, Hunter découvre aussi qu’avaler des billes, épingles et autres objets métalliques l’aide à garder une impression de main-mise sur sa vie…
Basé sur le pica, un véritable trouble alimentaire, le film construit avec soin sa protagoniste dont il nous dévoile lentement la psyché. Il s’agit du récit d’une femme-objet qui avale les objets qui l’entourent pour reprendre le contrôle d’un corps et d’un environnement lui ayant toujours été niés. Les scènes sanglantes d’absorption (et de déjection) renvoient à une rébellion libératrice pour Hunter, qui y gagne la confiance de remettre sa vie en question.
On ne peut pas vraiment parler de «body horror». Au lieu de l’aliénation qu’on retrouve dans ce genre de films, le pica tel que mis en scène ici sert à rapprocher Hunter d’elle-même et de l’auditoire du film. Swallow aborde ces tendances auto-destructrices avec une certaine douceur et plusieurs touches d’humour noir. Lorsque sa belle-famille finit par prendre conscience du problème d’Hunter, elle cherche… à la contrôler encore davantage!
Haley Bennett (Kristy, The Haunting of Molly Hartley) est parfaite dans le rôle principal. Ses yeux fuyants, sa voix à peine audible… Il faut la voir aller et venir, résistant à l’envie irrépressible d’avaler un autre bout de métal pointu. Elle fait face à un époux qui a l’empathie d’une patate (Austin Stowell) et reçoit comme rare support la sympathie d’un garde du corps syrien (Laith Nakli).
Il s’agit du premier long-métrage de Carlo Mirabella-Davis, qui n’échappe pas à quelques clichés mais réalise cette fable féministe avec inspiration. Le film continue de surprendre jusqu’à ses plans finaux, provocateurs et magnifiques.
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