En plus de leurs scones et de leur four o’clock tea, les Britanniques sont reconnus pour leur humour caustique, que personne ne défend mieux que la redoutable série télévisée The League of Gentlemen (d’ailleurs à l’étude dans l’anthologie Yuletide Terror de Kier-la Janisse et Paul Corupe). Chaque épisode de cette émission peu connue à l’extérieur de la Grande-Bretagne présente une série de sketches qui prennent place dans un même village. On y retrouve un couple de tueurs en série, un vétérinaire qui tue toujours accidentellement les animaux dont il a la responsabilité, un propriétaire de cirque qui enlève les femmes et les force à l’épouser…
Mais pourquoi on vous parle de ça, donc?
Parce que l’un des cerveaux derrière The League of Gentlemen, Jeremy Dyson, a coécrit la pièce de théâtre Ghost Stories en 2010, et que c’est son adaptation cinématographique qui est critiquée ici.
La pièce, qui a même été présentée en Australie, doit une grande part de son succès critique et populaire au secret qui l’entoure. Il n’en existe aucune image, sinon celles de spectateurs choqués ou effrayés, et ceux-ci se font rappeler à la fin du spectacle de ne dévoiler sa conclusion à personne.
Les concepteurs de la pièce, Dyson et Andy Nyman, sont aussi les réalisateurs et scénaristes de ce film qui raconte la descente aux enfers de Phillip Goodman (Nyman), l’animateur sceptique d’une émission de télévision qui dévoile les supercheries de faux médiums. Quand on lui confie les dossiers de trois hommes dont les expériences surnaturelles semblent impossibles à expliquer, Goodman doit admettre que non seulement il y a des histoires de fantômes qui sont vraies, mais que ces trois-là ne se sont pas rendues à lui par hasard.
Les jump scares font légion; voilà un film qu’on regarde entre ses doigts. Heureusement, avec un scénario si complexe et bien ficelé, on ne peut taxer ce stratagème de raccourci facile. Dans Ghost Stories, la caméra est habilement mise au service de la tension. Balayant lentement l’image, suivant les personnages de près pour ne pas nous en montrer plus qu’eux, et, surtout, jouant avec le focus pour embrouiller tour à tour le personnage et ce qui se trouve autour de lui, elle nous garde alerte, le cœur battant, sur le bout de notre siège.
Preuve que les gentlemen ne sont pas bien loin, on retrouve de nombreuses touches d’humour noir, grotesque et absurde, de même qu’un amour du maquillage qui fait des fantômes et démons de véritables abominations. Plusieurs scènes nous saisissent, comme celle vers la fin, où un personnage est couché par dessus un autre; on n’en dit pas plus, sinon que, quand elle est terminée, on n’a pas d’autre choix que de rire nerveusement pour chasser ce profond sentiment d’horreur.
Soutenue par une distribution impeccable dont font partie Alex Lawther (The End of the F***ing World) et Martin Freeman (The Hobbit,Cargo), Ghost Stories a pour seul défaut de proposer une conclusion qui, si elle emballe judicieusement chaque élément du récit, n’est pas aussi originale qu’on s’y attend…
Mais, entre nous, on s’en fout un peu, avec un ensemble aussi réussi!
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